Les Égoèmes

Les Egoèmes #31 – L’Ombre Neuve

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Il est venu le moment de lancer la 31ᵉ édition des Egoèmes !

Et le thème de ce mois de novembre c’est “L’Ombre Neuve”.
Elle nous suit comme notre ombre, depuis toujours, elle nous suit. Toujours la même, toujours la même silhouette. Et si elle venait à changer ?


Le thème est laissé à la libre interprétation des participant·es

Comment participer ?

Les participant·es ont une semaine pour envoyer leur création.

Date limite : jeudi 13 novembre 2025 à midi
Adresse d’envoi : egoemes @ larathure.fr (sans espaces)
Conditions de participation : suivre les comptes Instagram @larathure et @lesegoemes .

Comme à chaque édition, un texte de calibrage sera partagé pour aider le jury dans son évaluation.

Le jury de cette édition

Les jurys de cette édition sont les lauréat·es de la précédente édition :

Retrouvez leur présentation et toutes les actualités du concours sur la page @lesegoemes.

Il est temps d’ombrager votre feuillet !

Texte n°1 – Fragment d’être 

J’ai piétiné, enterré, massacré mon ombre,

Elle me dégoutait, espèce d’amas noir sans énergie.

Mon propre reflet, fidèle et authentique

Était vide, vide, creux, un vaste trou.



Je pensais n’avoir qu’à aller chercher

Aux enfers mon Eurydice de lumière,

Je ne voulais plus de ses traits effacés,

De son air de cadavre sans terre.



Sans jamais broncher elle me suit,

Mais comment ranimer cette boule de suie ?

Parviendrai-je à créer depuis ce néant,

Que j’ai avidement provoqué céans ?



Je découpe le langage, je refais le monde

En grand vacarme je construis l’ombre neuve,

Je conduis à la surface cette veuve

Du cimetière de mes sens émerge une onde.



Elle me traverse, quelle étrange silhouette !

Osez l’exquis du cœur si vous l’êtes ;

Sous mes pas le sol est de glace

Le courage est une ardeur vorace.



L’on m’ordonnait sans cesse de changer,

De juger mon reflet, ce que sans un chant j’ai

fais

J’ai connu les jours de plein soleil,

Ces heures de solitude éternelles.



Désormais sans honte et sans hésitation

Je sculpte des fragments éparpillés,

Que je vais, par-delà les sommets figés

Chercher au fond de mon corps brulant de passions.



Chaque souffle, chaque caresse est une naissance,

Celle d’une pièce égarée redevenue une puissance.

L’ombre neuve recrée de mes doigts palpite de vie,

Double construit des possibilités infinies. 

Texte n°2 – Ombre avec vue 

Est-ce la vie qui est en avance
Ou mon ombre en retard
À force de courir les rues
Après quel lampadaire
Mon caillou s’élance à cœur perdu
Ma parole
À quelle marelle je joue
Compostelle passe là où l’on ne l’attend pas
Un chemin
Dessiné à la craie blanche sur un trottoir de nuit
Et je persiste à le chercher à l’autre bout du monde
Comme si le ciel n’habitait pas la porte à côté 

Texte n°3 – L’ombre nouvelle 

Elle me suivait, lourde et silencieuse,
La vieille ombre, compacte, possessive.
Chaque pas que je faisais semblait creuser
Un sillon de peur dans son empire nocturne.
Elle riait dans mes silences,
Se glissait dans mes gestes, mes replis,
Comme si tout mon corps lui appartenait.

Mais l’aube finit par s’infiltrer,
Et j’ai senti une vibration, un souffle,
Une hésitation dans ses contours sombres.
Je ne savais pas encore, mais l’ombre ancienne
Allait se fissurer sous le poids de ma volonté.

Alors, j’ai commencé à marcher autrement,
À tracer mes pas selon mon désir, ma voix.
L’ombre nouvelle est née de ce mouvement,
Svelte, légère, mais furieusement entière.
Elle ne me suit plus en chaînes,
Elle danse, elle défie, elle protège,
Elle rit dans le vent et dans la lumière.

La vieille ombre recule, gronde, s’efface,
Mais elle ne me touche plus.
Chaque cicatrice devient éclat,
Chaque tremblement se transforme en flamme.
Je suis debout. Je respire.
Et l’ombre qui m’accompagne désormais
N’est plus celle qui m’a brisée,
Mais celle que je construis, moi-même,
À chaque souffle, à chaque pas, à chaque victoire. 

Texte n°4 – L’ombre de la femme 

Elle m’accompagne depuis mon plus jeune âge
L’ombre de la femme qui n’a pas de visage
Elle est pour moi une bien étrange amie
Une présence dans ma solitude, une compagnie
Elle a pris l’habitude de me visiter la nuit
Je la sens s’approcher de moi lorsque je suis endormie
Elle me frôle, je frissonne, j’ouvre les yeux pour capter son image
Mais jamais je ne la vois et elle me semble un mirage
Parfois il m’arrive de l’entendre aussi
Elle me murmure des secrets aux mots imprécis
Je crois lui reconnaître un timbre familier
Et pourtant je sais que je ne l’ai jamais rencontrée

Mais l’ombre un beau jour semble prise d’une facétie
Elle modifie notre rendez-vous et ne m’a pas avertie
La voilà ce soir là, confuse et l’allure volage
Elle s’empresse de me délivrer un troublant message
Ses mains sont floues et sa voix chevrotante
Je tremble de la voir ainsi hésitante
Soudain je la distingue et ses traits se dessinent
L’ombre de la femme a un visage sublime
Elle me dit qu’elle doit me laisser car on l’a rappelée
Elle me confie avant de me quitter sa dernière volonté
« Ma petite fille tu as le droit de vivre et d’exister,
Mon enfant ouvre ton cœur et laisse toi aimer » 

Texte n°5 – Une ombre 

Je m’étais endormie, allongée au soleil,
Quand une ombre, soudain, m’a tirée du sommeil.
Était-ce dû au froid ou alors à la peur,
Que j’ai eu ce frisson, présage de malheur ?
Je l’avais tant de fois rencontrée sur ma route,
Que je l’ai reconnue : c’était l’ombre d’un doute. 

Texte n°6 – Médusa 

À travers les flammes noires,

D’une solitude maudite,

Que les lumières évitent,

Errant, sans lois ni gloire.



L’opéra des ombres me chante,

Un mélodrame des enfers,

Laissant mon âme en misère,

Et cette voix qui me hante.



Les cris me martèlent,

Depuis les rives du désespoir,

Me cachant de la lueur du soir,

J’ignore en vain leur appels.



Voici venue l’infâme sirène,

De son hurlement divin,

Elle me pétrifie dans le déclin,

Seule la poussière irrigue mes veines…



Les limbes m’ont eu à l’usure, je suis déchu..

Échouant dans le néant absolu.. 

Texte n°7 – Là où le coeur se retourne 

J’ai marché longtemps
dans les chemins que je croyais connaître,
les poches pleines de petits morceaux d’hier
qui tintaient comme des clés inutiles.

Puis un soir,
quelque chose s’est déplacé —
à peine un souffle,
mais assez pour changer le ciel.

Ce n’était pas une nuit plus sombre,
ni une peur nouvelle.
Plutôt une présence discrète,
venue de l’intérieur,
comme si la vie
avait recommencé à écrire.

Ce qui me suivait
ne portait pas d’ombre lourde :
c’était un éclat feutré,
à la frontière du silence.

Il m’a parlé sans mot,
avec la lenteur des choses vraies :
« Ne tremble plus.
Ce qui t’attend n’est pas le gouffre,
mais ton propre retour. »

Alors j’ai accepté.
J’ai laissé derrière moi
les voix qui savent toujours mieux,
les regards qui pèsent,
les portes qui claquent.

Et j’ai regardé devant —
pas loin,
juste là où le pas se pose.

J’y ai rencontré
un espace clair,
où les blessures se reposent,
comme des oiseaux fatigués
qui n’ont plus peur de l’aube.

Dans ce lieu,
le cœur se retourne
et se reconnaît.

Il comprend
que même ce qui fait mal
peut-être une lumière en secret,
un commencement tranquille,
une façon de renaître
sans bruit.

Texte n°8 – Fil d’ombre 

Le tissu se balance, virevoltant au vent,
Le drap blanc, tout pendant, en souvenir d’enfance,
Les doux doigts de maman, accrochant ou pinçant
Chaque coin et recoin du carré de douceur,
Sur lequel reflétait la poétique noirceur
De mon ombre authentique, innocente, enfantine.
Les feuilles ont depuis jauni, pas moins de dix,
Et maman est partie, envolée en fumée.
Mais mon ombre est restée sur ce drap, bien figée,
De mon regard absent, mon esprit divagant,
Chaque larme effaçant tous mes chagrins d’enfant.
Le linge scintillant laisse le moi de maint’nant
Aux côtés de ma fille, ma femme, ma famille. 

Texte n°9 – Pourquoi pas moi ? 

Il y a des jours où le ciel semble me regarder sans me voir.
Où la lumière passe sur moi
comme une main qui oublie de caresser.
Je suis là, pourtant.
Respirant, vacillante,
ombre parmi les vivants.

J’ai appris à sourire pour ne pas effrayer les gens heureux.
À baisser les yeux quand ils racontent leur bonheur,
comme on cache ses cicatrices sous des manches longues.
J’ai appris à rire aux blagues
pendant que mon cœur crie dans le vide.

Parfois je me demande :
pourquoi certains naissent dans des bras,
pendant que d’autres tombent dans le froid ?
Pourquoi l’amour choisit-il toujours les mêmes visages,
les mêmes adresses, les mêmes prénoms ?
Pourquoi le destin, ce dieu distrait,
me laisse-t-il sans caresse, sans épaule, sans refuge ?

Je regarde les autres vivre,
comme on regarde un film qu’on ne joue pas.
Ils s’aiment, se cherchent, se trouvent, se perdent
et moi je reste là, spectatrice de ce que je n’aurai pas.
Ils ont des mères qui sourient,
des amis qui répondent,
des amours qui tiennent leurs promesses.
Moi j’ai des silences.
Et des draps froids.

Le matin, je me réveille avec un vide à la place du cœur,
et la nuit, j’essaie de convaincre mes larmes
de ne pas faire trop de bruit.
Je me dis que ça passera.
Mais rien ne passe.
Rien ne part.
Tout reste.
Tout colle à la peau,
comme une pluie qu’on ne sèche jamais.

Il y a des jours où je me déteste d’espérer encore.
De croire qu’un message viendra, qu’un regard me verra,
qu’un mot, un seul,
me rendra réelle.
Mais les gens aiment les soleils.
Personne ne s’arrête pour une ombre.

Alors j’avance.
Avec mon vide pour seule compagnie.
Avec ma peur d’être oubliée avant même d’avoir existé.
Je mets du rouge sur mes lèvres
pour colorer mes silences,
du parfum sur mes poignets
pour que quelqu’un, quelque part,
puisse imaginer mon odeur,
même sans me connaître.

On dit que l’automne est la saison des renaissances,
mais moi je m’y noie chaque année un peu plus.
Les feuilles tombent, les gens s’aiment,
et moi je tombe avec elles,
sans main pour me rattraper.

J’envie les gens qui ont un “nous”.
Moi, je ne suis qu’un “je”
trop lourd, trop fatigué.
Un “je” qui fait semblant de vivre
pendant que son cœur mendie.

Certains prient Dieu,
moi je parle à la lune.
Elle au moins,
elle me regarde quand je pleure.
Elle ne me répond pas,
mais elle reste.
Et dans son silence,
je me sens un peu moins seule.

On dit qu’il faut s’aimer soi-même pour être aimé.
Mais comment aimer ce qu’on n’a jamais appris à regarder ?
Comment embrasser les ruines
quand tout le monde préfère les palais ?
Je ne suis pas un rêve.
Je suis le revers du rêve.
Ce qu’on cache, ce qu’on tait,
ce qu’on ne veut pas devenir.

Et pourtant…
il y a dans mon cœur un morceau de lumière
qui refuse de mourir.
Une étincelle têtue,
ridicule,
qui croit encore que demain, peut-être,
quelqu’un posera sa main sur ma joue
et dira doucement :
« je te vois ».

Et ce jour-là,
le monde pourra bien brûler,
je saurai enfin pourquoi j’ai tenu si longtemps. 

Texte n°10 – Au bord des yeux 

J’ai le cœur au bord des yeux
Et les bleus dans ma voix
Guident l’eau salée sur mes joues,
Inondée par cet entre-deux.
Ma peine déborde, elle est là,
Courbée sous le poids de ton joug.

La vie, comme une étoile, file
Au tempo d’une autoroute.
Ton image aboie de revenir,
Un lit repose sur ton île.
La peine a englouti les doutes,
Et ruissellent les souvenirs.

Ton sourire est mon rempart,
Nul besoin d’y résister.
Il me retient et me renvoie
Aux adieux, aux quais de gare,
Lorsque nous étions débordés,
Le temps fuyant au bout des doigts.

J’ai des larmes au bord du cœur,
Et le rouge du soleil couchant
Me rappelle l’essentiel :
Il n’existe pas de bonne heure
Ni de joie, évidemment,
Aussi vaste que le ciel.

Ton île est un nuage.
Je te vois, si solaire,
Sublimant l’absence dans mon ombre.
À bientôt, sur mon rivage.
Non loin de ta pluie de lumière.
À bien-tard, dans ton autre monde. 

Texte n°11 – À celles et ceux qui ne sont pas heureux 

Il y a ceux qui s’essaient tant bien que mal à vivre
Et ceux, les bras baissés, qui se laissent mourir ;
Celles qui parcourent le monde en éternelle errance
Et celles qui ne savent plus définir l’espérance.

Il y a sur leurs visages des fissures sépulcrales
Héritées d’insomnies ou d’un songe spectral ;
Une ombre dans leur dos imbibée d’encre noire
Qu’ils tentent d’égarer au tournant d’un trottoir.

Il y a cet hiver blanc dénué de couleur
Accablant d’un silence où résonne leur douleur ;
Si tu es comme elleux, incomprise, malheureux,
Sache qu’il n’est pas trop tard pour aspirer à mieux.

N’écoute pas les bruits qui réprouvent ou accusent,
Entends ta propre voix en ton cœur recluse.
Nul ne peut méjuger tes causes d’anxiété
Ni déclarer conforme ton identité.

Or il y a ceux qui croient et ceux qui sont usés,
Celles que le gouffre apaise et appelle à plonger ;
Dans leur lignée tu prends une résolution funèbre
Et un pied dans le vide, tu touches les ténèbres…

Mais soudain l’aube pointe, la lumière t’aveugle,
Elle étend derrière toi l’ébauche d’une ombre neuve ;
Devant ton double obscur enfin tu t’émerveilles :
Il est la preuve irréfutable que tu existes sous le soleil. 

Texte n°12 – Nouvelle âme, nouveau mal 

Un jour je suis née
Elle a était la première à se présenter
Elle s’est mis à respirer
Et sentant l’air je me suis mise à pleurer

Déjà petite elle me suivait
Elle était pleine de couleur comme un soleil d’été
Je voyais la vie en rose
Je ne parlais pas encore en prose

Je m’étais fait des amis par milliers
Et de tout le monde, je me sentais aimée
Aucune pression sur les épaules
Si elle avait su la suite, elle se serait sentie toute penaude

En grandissant, les enfants perdent leurs côtés innocents
Ils commencent à voir les différences et fuir les gens
Mon ombre s’est déformé le jour où j’ai compris que j’étais spéciale
Elle était tellement étrange, elle n’était plus banale

Quand on arrive au collège et qu’on est pas dans la norme, l’enfer commence
Je me souviens de mon cœur qui se serre quand j’y pense
Les gens devenaient méchants
Ça devenaient omniprésent

Mes mains sur mes yeux je tentais de l’éviter
Mais c’etait incontournable, elle allait me tuer
Sa douce sensation de chaleur avait disparu
Laissant place à une froideur ardue

Elle qui me faisait voir la vie en couleurs
Elle a détruit mon bonheur
Mon ombre si parfaite et sans erreur
Venait d’engloutir mon cœur

Au sol, il n’y avait plus d’ombre
Mais moi, j’étais de plus en plus sombre
Je suis devenue l’une d’elle
J’errais dans le noir comme immatérielle

Et puis je suis apparue devant un nouveau né
Je l’ai sentie tout de suite quand je me suis présentée
Elle était anormale
Pour m’en sortir je devais devenir à mon tour, son mal. 

Texte n°13 – Sous mes pas 

Depuis l’aube, elle marche à mes côtés, docile,
Muette comme un vœu, fidèle comme un mal.
Je ne l’ai jamais vue, sinon dans le cristal
Des flaques où le ciel s’écroule et vacille.

Elle portait mes fautes, mes élans inutiles,
Elle savait le poids de mes retours égaux.
Quand je tombais, c’est elle qui pliait le dos
Pour recueillir ma honte en gestes immobiles.

Mais voilà qu’un matin, sans cri, sans horizon,
L’ombre a bougé — non pas selon le soleil,
Mais d’elle-même, hors de ma déraison.

Et j’ai compris : c’était la mue du sommeil,
Mon double ancien qui quittait sa prison —
Et sous mes pas, l’ombre neuve, enfin, prenait conseil. 

Texte n°14 – PERDU DANS LA FOULE 

Un regard perdu dans la foule,

Cherche son chouchou, comme chaque jour.

Lui seul éclaire ma raison,

Quand je le vois, tout devient passion.



Le bruit s’efface, le temps s’arrête,

Mon cœur s’envole, mon âme s’élève

Le monde devient un doux paradis ensoleiller

Quand son regard vient me frôler. 

Texte n°15 – Ombre vivante 

Perdu je suis seul dans une ruelle sombre
Faiblement éclairée, lumière vacillante
Ma seule compagnie ? Les contours de mon ombre
Mais elle semble étrange, étant trop chancelante

Est-ce vraiment mon ombre, ou une silhouette ?
Elle paraît vivante, évoluant vers moi —
Des pans de fumée noire au-dessous d’une tête
Que je ne peux bien voir, mais ses yeux me foudroient

Et dans les ténèbres de ce bien trop long soir
Elle est mon reflet et je suis son miroir —
Étant née de mon ombre, on est à l’unisson

Mais elle se libère alors de mon emprise
Son rôle silencieux soudainement se brise
Je la suis malgré moi — et nous disparaissons… 

Texte n°16 – SE DEVENIR 

La mue était devenue obsession
Quand le dégoût avait fini par peser
Plus lourd encore que cette peau
Qu’il n’avait pas choisi d’habiter.

Il ne savait plus dans quel sens la porter,
Sans avoir l’impression d’avancer à reculons
De ce que la vérité de son être désignait comme direction.

Il rêvait d’un autre pronom,
D’une ombre nouvelle,
Où l’exil du genre
Aurait enfin visage de devenir. 

Texte n°17 – Spectres d’un génocide 

Au comble d’une fêlure brusque de l’existence
Des êtres vivotent sous l’écrin de l’infamie
Dans une parade d’obus qui brouillent les sens
Végètent des corps plongés dans l’agonie.

Des ombres discrètes se faufilent dans la nuit
Par des lueurs novices qui s’étendent sans bruit
Elles ravagent les rues sanglantes qui crèvent
Et happent des vies décousues qui s’achèvent.

Le ciel émaillé d’un clair-obscur sans étoiles
Reflète l’ombre nouvelle d’un conflit menaçant,
Et se tisse l’aube maculée de ténèbres glaçants,
Dont l’horizon ternie se barde d’un amas de voile.

Le sort commun se restreint dans des sépultures en nombre
Chaque respiration présage la fin d’une âme dans la pénombre
Criblés de trous béants sur les parois morcelées de l’épiderme
Un sourire frêle se brandit en une bouche lasse qui se ferme.

L’ombre neuve de la guerre a détruit la paix dans nos lieux en étau
Des signes de fatalité persistent sur notre enclave en vase clos
Spectres d’un génocide éprouvant qui s’éternise
Par un véto d’offensives et blocus qui s’aiguisent. 

Texte n°18 – Alphabet couché 

Notre L pas bien d’équerre
Sur les pavés de la gare
Éclair noir, couché, cadran tonnerre
Lame creuse dans la paume de la mare
Un simple T de liberté
La joie d’un Y les bras levés
Sur le sable dru dans les prés chauds
Le fuseau satellite des gens patients
Ou la lance qui protège la neige d’un banc
Le rail géant des heures du soir
La chaîne aux chevilles midi tapante
La tresse sans couleur déroulée sur la berge
Ou le pieu de rien nu sur la grève
Et se blottir contre une cathédrale
Pour la laisser grandir
Et courir pour lui échapper
Poser son front contre le soleil
Et ne plus l’avoir en atèle
Chaque demi-tour renouvelle
La peau obscure
Longue, dune, fidèle 

Texte n°19 – L’ombre d’amitiés factices 

Je voudrais être ingénue et croire encore en des liens propices
Déconsidérer chaque leçon que m’a apprise ces amitiés factices
Occulter leurs railleries et vices que je me persuade innocents,
Et arrêter de faire triompher la raison sur mes faibles sentiments.

Mais elles s’étirent, dansent, se modulent en silhouettes géantes
Comme une étrange procession de formes invisibles qui hantent
Sur la paroi des souvenirs, les ombres neuves se flanquent à ma peau
Dans un langage inédit de ma mémoire qui se déferle prompte en halo.

Prendre mon bien-être en filature de peur qu’il ne s’échappe en trombe
Dans l’espoir candide de renverser un cortège de traumas
Je milite contre une épopée amicale auréolée de faux pas
J’evince le monde autour pour un retrait consacré sans chape de plomb.

J’ai le cerveau qui ploie sous un iceberg de moments désastreux,
Dont la partie émergée me rappelle combien avoir des amis était affreux,
Quand se rognent nos défenses à cause de brèves sensations d’écoute,
C’est alors qu’on cherche à ressusciter les mœurs des jours de doute.

Les spectres de la déception arpentent les couloirs de ma lucidité
Si tant est que ces fantômes me dictent une prudence décuplée,
Quand on se sent rassurés par les amitiés exaltantes du tout début,
C’est alors qu’elles flétrissent au fil de déboires et personnalités déchues. 

Texte n°20 – Éveil et trêve 

La lumière se faufile comme un rêve
Parmi les paupières entrouvertes,
Le jour sur la nuit désigne une trêve
La joie fait pleure mes yeux verts.

Parmi les paupières entrouvertes,
Je cherche la nouvelle journée.
La joie fait pleurer mes yeux verts
Ta main sur ma joue s’est glissée.

Je cherche la nouvelle journée,
Sans souvenirs de la nuit silencieuse ;
Ta main sur ma joue s’est glissée,
Mon âme jubile, amoureuse.

Sans souvenirs de la nuit silencieuse,
Mon regard, vers le soleil se lève ;
Mon âme jubile, amoureuse,
La lumière se faufile comme un rêve. 

Texte n°21 – Contours d’ébène 

Paris,
Un jour tout gris,
Un soir de pluie,
Le soir s’est assombri
Emportant avec lui
Les couleurs dans la nuit

Une noyade dans le regard,
Des cris muets dans la voix,
Les espoirs empoussiérés,
Elle courait comme une forcenée,
À contre-courant dans la marée,
Des fantômes arrimés à ses pieds

Un cœur brûlant,
Une âme en sang,
Elle a froid dans sa tête
Envahie par la tempête ;
Sur sa silhouette
Se dessine un corps d’athlète
Filant comme une comète

Elle sème ses démons
Et ses défauts de fabrication
Pour s’enfuir de sa prison
Ancrée dans des caissons
De poèmes en cargaison
En courant vers l’horizon

Du cambouis dans le cœur,
Des rêves plein les poches,
Des cauchemars dans les yeux,
Belle dans le ciel de ses drames,
Vers l’infini en angle droit
De sa vie sous l’au-delà,
Elle s’est blottie dans le delta
De ses écrits ternis d’effrois

Il y a sur les pages jaunes
D’un papier cramoisi,
Ses frasques dans le blanc
Des marges rouge sang

Elle trace dans l’abîme
À l’encre bleu marine
Une ombre sans racine
Comme une amie sur ses ruines,
Un parfum de mandarine
Dans le sillage de ses épines
Qu’elle dessine en héroïne

Sans noir foncé,
Sans obscurité,
Sans reflet basané,
Juste une once de clarté
Sur un instant volé 

Texte n°22 – L’ombre nouvellement soleil 

Il est des horizons obscurs
recouverts de cette ombre passagère,
noire et terne, une blessure.
Tantôt démesure, tantôt éphémère,
À la merci des saisons,
de mon âme le diapason,
son flambeau terni par les ans
ne laisse plus entrevoir d’espoir.
Battant les pavés, déversoir
mélancolique, errant sans but
dans les herbes folâtres, elle chute.
La solution : une peau neuve !
Muer de chrysalide en papillon.
Plutôt que de se tenir au sol,
de petits ruisseaux en fleuve
dans un immense tourbillon
touchant les luxurieuses coupoles
elle embrasserait le ciel vermeil !
Pour un instant dire bonjour au soleil ,
s’acoquiner aux étoiles, changeant
son manteau en firmament
brillant de mille feux, et là,
prouver que toute destinée
n’est pas vouée à la nuit des temps ! 

Texte n°23 – Retraite 

Sur mon île, pépère,
Loin de tous les hivers,
J’ai fait ombre et peau neuves
Avec un sombrero,
Un sombrero nouveau !
Oubliés, les tracas,
Les frimas, le fracas,
Ceux de ma vie d’avant,
Je profite à présent
Des plaisirs estivaux,
Farniente et apéro ! 

Texte n°24 – Là où renaît le jour 

J’ai traversé tant d’ombres avant de te trouver,
des ombres épaisses où même la voix s’éteint,
où l’on oublie jusqu’à la forme du jour.

Et puis, un matin sans promesse,
quelque chose a tremblé dans la poussière du cœur :
une ombre neuve,
claire comme un pardon.

Elle ne fuyait pas la lumière,
elle la recueillait.
Elle cousait mes ruines
avec le fil discret du possible.

Tu es venu, non pas pour combler,
mais pour révéler ce qui tenait encore.
Ton regard ne prenait rien,
il redonnait forme à ce qui attendait d’être vu.

Alors j’ai compris :
l’amour ne répare pas,
il recommence.
Il fait du vide une terre,
et de la perte, une demeure.

Depuis, je marche plus lentement,
le cœur lavé d’orgueil,
les paumes ouvertes à la nuit.
Je sais désormais que l’ombre,
quand elle est neuve,
peut éclairer mieux qu’un soleil. 

Texte n°25 – Le soleil nouveau 

De mes pas feutrés par le sable,
Je cherche à contempler l’horizon.
J’attends patiemment le moment où, sortant des profondeurs,
Un nouveau soleil offrira ses rayons.

Le ciel s’ouvre lentement comme une promesse,
Et le soleil, en offrande, caresse mes détresses,
Transformant l’ombre, qui danse à mes côtés,
En personnage surréaliste, d’un vingtième siècle déchaîné.

Ce spectre aux traits mouvants, échos de mémoire,
Errant entre Unica Zürn et les cris de l’Histoire,
Me chuchote des vérités sidérales,
Que le sable tente en vain d’effacer.

Mais je marche encore, mu par la lumière,
Vers un horizon qui respire la matière,
Et dans l’éclat d’un soleil enfin apprivoisé,
Je devine l’art de renaître, libre, tout entier. 

Texte n°26 – MOURIR REINE 

La vie est vraiment magnifique,
Mourir reine, telle fut ma destinée,
Parure d’or, éclat de diamant,
D’une beauté resplendissante,
À dix-huit ans, la lame me prend,
Décapitée,
J’ai gouté la flamme,
Et j’ai brulé,
Je revois ma vie, et ce roi,
Jaloux de ma lumière,
Je meurs reine,
Le couperet tombe, froideur sans ombre,
Je meurs reine. 

Texte n°27 – Sans titre 

Une nuit, un fennec est sorti de ma peine.

Il sort la nuit, quand mes pensées me hantent.

Son ombre était dorée, neuve comme un matin d’oasis.

Il m’a dit :
‘Les morts ne dorment pas,
ils veillent dans ton pas.’

Petit fennec enjoué,
il renifle mes peurs
et les enterre dans le sable.

À l’aube, il me laisse un cadeau :
une ombre neuve,
L’ombre neuve,
c’est l’enfant que j’étais
revenu me pardonner. 

Texte n°28 – L’ombre 

Pris dans l’égrégore de nos forces sombres
Nous ne voyons souvent que nos propres ombres,
Résurgences de nos blessures profondes
Bien enfouies sous des brumes nauséabondes.

Dans la nuit noire, nos âmes vagabondes
S’attirent, se repoussent et se confondent.
Enlisées dans les marécages de nos peurs
Cherchent des lueurs pour sortir de la torpeur.

Écoutons alors le doux chant des baleines.
C’est lui qui nous fera reprendre haleine.
Plongeons dans les profondeurs de son essence.
Immergeons-nous dans toute sa bienveillance.

Sages gardiennes des mémoires du monde,
Elles nous guident, nous offrent de belles ondes,
Nous encouragent à retrouver confiance
Et nous libèrent des mauvaises croyances.

Mystérieuses et puissantes messagères
Elles nous donnent la direction de la lumière,
Celle de notre propre source intérieure
De guérison et de forces supérieures. 

Texte n°29 – on n’est que des Sans-Âmes pour vous ? 

je suis s parfois
ils ne nous voient que comme des n
des sur n
en plus, EN PLUS,
ils croient que nous sommes toustes des concom
des moutons 

Texte n°30 – Mon Ombre 

Mon ombre me suit
Comme moi elle n’a pas d’ami.
Nous nous ressemblons,
Toutes deux nous nous suivons.
Lorsque je suis dos au Soleil
Elle me nargue et je l’écoute d’une oreille.
Mais quand je fais face à la lumière
Elle boude en restant derrière.
Lorsque vous me voyez seule, vous vous trompez,
Regardez à vos pieds.
Elle seule peut me comprendre,
Dans ce monde de cendres.
Son cœur est brisé,
Personne ne veut l’écouter.
Pourquoi moi seule l’entend ?
Pourquoi moi seule la défend ?
Elle me suit,
Restera pour toujours mon amie.
Elle ne peut pas m’abandonner
Car elle n’a nulle part où aller.
Quand je mourrais,
Elle aussi sera condamnée.
Elle n’apprécie que moi,
Elle ne vous aime pas, mais elle vous voit.
Vous l’ignorez,
Tout comme celle que vous avez aux pieds.
Selon vous, c’est une silhouette noire.
Selon moi, c’est le réconfort dans le désespoir. 

Texte n°31 – LA PART DES ANGES 

Des linceuls aux doigts de suie,
Dansent, légers sur les murs de craie,

Leurs pas et leurs soupirs sans bruits,

S’enveloppent de lambeaux et d’éternels regrets.




Ils glissent et rient, se tordent, maudits,

Dans leurs yeux un néant où le temps s’est perdu,

Ô rêve éveillé, qui pourtant se poursuit

Où les âmes s’y noient et désirent leur salut.




Là, filent les ombres et les remords s’apaisent,

À travers les nuées et les parfums de cendres,

Où se déchire un ciel d’or à l’éclat de braise ;

Des voix s’élèvent en échos dans l’infini méandre.




Crépuscule vile à la lune sensible et morte,

S’humecte de larmes, un vin des Hespérides,

Hantise au cœur vide où la vie nous emporte,

Scelle l’ivresse des nuits ombragées d’anges et de sylphides. 

Texte n°32 – Positif du négatif 

Ombre n’est que mot

pour dire le sombre

ombre féconde

joue désillusion

au revers de lumière



mordre l’ombre

saigner l’ombre

spectre invisible

dans le halo réverbère

au bord intime des précipices



le saut dans l’oubli des souvenirs amers

renverse l’ordre établi

positif du négatif

lumière jour et nuit

l’aurore à midi-minuit



je m’aime sans tiers

objet désincarné

double de moi-même

être unique

identité lumière

sujet de désirs

les frustrations étalées en plein jour



je tue les fantômes

qui rampent dans mes nuits

je suis corps

sans angle mort

dans le halo du lampadaire

tout est en l’air



j’enterre les os de mes racines

je me rêve autre enfance

d’amours violences

je m’exile

dans ma caverne illuminée

brillent mes yeux de fou 

Texte n°33 – L’ombre de la mort 

D’un souffle court expiré de la gorge qui ploie
Il lutte face aux métastases qui brident sa voix
Le torse creux démantelé par la maladie au corps
Le goss damné s’élime contre l’abîme de la mort.

Une ombre neuve vogue au dessus de son lit
Danse comme dans un rituel de deuil promis
Sur les rives du monde des défunts, elle livre l’accès
Spectre du trépas à la quête d’âmes pour son forfait.

Les silhouettes noires forment une nuée de nouvelles ondes
Qui tapissent les murs transfigurés en épitaphes moribondes,
Leurs ténèbres enserrent le petit bonhomme au porte d’Hadès
Couloir de la décrépitude fixant en perspective un destin funeste.

Corps en transe juché aux abords macabres de la débâcle
Son espoir ruiné par les digues d’un vain traitement miracle
La lumière disparaît au détriment d’un sombre tournant indéfectible
Victoire de la mort qui jette son ombre neuve sur une vie jadis paisible. 

Texte n°34 – Réalisation 

Il était saoul de vie, des rosées du matin,
Pensées dithyrambiques, sur lui-même, sur les siens;
Au râle mourant de l’Aube, pure beauté calcinée
Naquit l’armée de clones, de leur ton, pas volé!

Feu, le dernier rayon, s’en alla, calmement;
Ombrage sonna le gong; de la fin, le néant;
Puis surgit la bataille, de cette ferveur Apaches;
Firent danser nos semblables, au chant des coups de hache.

De cette forêt humaine, autrefois si feuillue;
Ne gisait plus que l’homme, en quête de sa vertu;
Fidèle anthropophage, où es-tu destrier?
Je n’y pus vivre sans toi, je suis ton chevalier!

Hélas, rompt chapelet, d’où surgit la nocive;
N’use pas bien trop ta foi, caprice au goût d’ogive;
Mon Dieu! s’écria-t-il c’est faux, ce n’est pas moi!
L’Ombre Neuve a prit pour cible; l’écorché, l’adéquat. 

Texte n°35 – L’Ombre Rouge 

Mon ombre a cessé de bouger ce soir,
Rouge, elle brûle au pied du trottoir.
Je crois l’avoir perdue, qu’elle est devenue poussière,
Mais c’est mon cœur posé sur cette terre.

Elle me dit : « Regarde, je suis à ma place, »
Je suis dans ton pas, ta chute, ta grâce.
Je suis celle qui t’observe et t’éclaire,
Ton double silencieux, ta lumière claire.

À genoux je sens battre son feu,
Sous mes paumes monte un souffle bleu.
Chaque cellule devient prière,
Chaque silence devient matière.

Je me renverse, mains dans la flamme,
Et l’ombre sourit sous mon âme.
Même à l’envers, elle me soutient,
Ancrée à moi aujourd’hui comme demain.

Quand la nuit recouvre la plaine,
Je sens sa chaleur douce et pleine.
Rouge encore, elle me murmure :
« Je suis ta vie, sa part obscure. »

Alors je me pose sur elle,
Au seuil d’une vie nouvelle,
Pour me lier et l’épouser,
Dans un pacte, un souffle sacré. 

Texte n°36 – Prémices de l’aube 

Sous le préau de l’enfance ébréchée
tu distingues encore la voix cristalline
du silence glacial crépiter dans le brasier
d’une nuit éreintée de froidure

La main de l’écriture semble vouloir atteindre
l’écorce pétrifiée de ces années
avant que ne l’entrave l’amas de pénombre
sous la voûte squelettique des érables centenaires

Résonance des hivers qui scandent la ritournelle de l’errance
dans la forêt perdue de l’insouciance

Enseveli au centre des filigranes de ta page boisée
Tu recherches alors une respiration virginale

Un souffle nouveau qui jaillirait
inquiet comme la fine peau de ton sourire
juste avant les prémices de l’aube

Tu t’imagines alors résident de l’indicible dénouement
lorsque tes nuits de givre s’effriteraient

Seules dialoguent les époques sous l’ombre neuve de l’écriture 

Texte n°37 – La douleur du quotidien 

Elle est ma compagne de voyage,

La cause de tous mes orages.
La souffrance dont je suis le bourreau,
Où que j’aille me suit,
Par le déni, je la fuis,
Elle me coursera jusqu’au tombeau.

Je voudrais partir,
Partir pour me fuir,
Fuir si loin,
Si loin qu’en chemin,
Même mon ombre
Perde mon souvenir.

C’est par l’écriture
Que j’effleure ce désir,
Celui de m’éteindre un peu
Sans vraiment mourir.

Le jour où elle me quittera,

Vivrais-je la plus grande joie ?

Y penser m’emplit de fois,

Mais pour l’instant,

Je n’ai que maintenant

À mon plus grand désarroi. 

Texte n°38 – Fenêtre 

le cœur qui a comblé ma solitude
a aussi comblé la petite fenêtre
qu’il y avait en moi

il fait un peu plus sombre
plus froid
le monde se résume à peu près à toi
et quelques images floues

il y a des gens des paroles qui paraissent insignifiantes
la musique ne donne plus
l’impression de vouloir être écoutée

je ne vois plus rien
je crois
la maison est vide

il y a toi
mais le soleil me manque 

Texte n°39 – Le retour de l’ombre 

Un mardi Le Gars perdit son ombre.
Elle s’était diluée dans l’obscurité provoquée
par un vol de nuages sauvages
et elle en avait profité pour s’évader
en emportant ce que le Gars gardait dans sa tête
Mais avec les ombres… !

Le Gars remarqua que lorsque l’obscurité l’enveloppait,
la nuit ou dans la solitude morne de sa chambre
il retrouvait tout ce qu’il avait perdu dans sa tête
et pensait à l’infini.
Mais avec l’infini… !

Il enquêta la nuit pour avoir toute sa tête
Mais comment retrouver une ombre dans la nuit ?
Qui se soucie de ce que deviennent les ombre la nuit ?
Il en conclu qu’il n’avait que deux solutions
Et la deuxième était de voler l’ombre d’un autre
Mais avec les autres … !

Dans un recoin sombre dans l’ombre de deux murs.
Il tomba sur une ombre perdue abandonnée
Rien ne ressemble plus à une ombre qu’une autre ombre
Il endossa cette ombre inconnue et juste à cet instant
son ombre revint penaude et repentante comme un fils prodigue,
Je vous avais bien dit qu’avec les ombres… !

Il se retrouva avec deux ombres en même temps.
Une ombre est de trop dans cette ville
Comment éliminer une ombre ?
La question se pose
Mais avec les questions… ! 

Texte n°40 – Ombreuse espérance 

Dans les sillages et les méandres,
Cette frayeur qui nous hante:
L’humanité détruite hier.
Vient se glisser dans nos prières
Cette forme inconnue,
Naissante, elle est nue;
Face à l’horreur de nos guerres
Elle se pose telle une pierre,
Immobile et silencieuse,
Mais pesante et gracieuse;
Il n’y a plus qu’elle.
Au coin d’une ruelle,
De nos pensées sombres,
S’élève cette ombre,
Porteuse d’un renouveau,
L’ombre est un espoir plus beau 

Texte n°41 – L’ombre de moi même 

Mon ombre, fidèle compagne de toujours,
Qui dansait avec moi sous tous les soleils,
Depuis que mes premiers pas brisent les jours,
Et que mon âge était encore sans pareil.

Elle était là, courbe tendue à mes pieds,
Prolongeant mon geste, mon rire, mon effroi.
Un miroir silencieux, jamais voilé,
Seul témoin parfois de ce que je croyais.

Mais aujourd’hui, sous le ciel familier,
Elle s’étire d’une façon nouvelle.
Ses contours, autrefois si familiers,
Me semblent étrangers, une énigme, une ombre belle

Et pourtant distante, quoi donc a changé ?
Est-ce moi qui me déforme, au fil des ans,
Ou l’écho de mon âme qui s’est éloigné,
Laissant une autre ombre dire ses tourments ?

Elle n’est plus ce simple trait à mes talons,
Mais une présence aux formes inconnues.
Elle me suit, oui, mais comme par emprunt lontain,
Une signature d’une autre vie, d’autres vues.

Je la regarde, un peu perdue, un peu effrayée,
Cette ombre qui fut moi, et qui ne l’est plus.
Une âme sœur d’hier, aujourd’hui transformée,
Au seuil de ma propre peau, je la vois, je la sens dans mes rues. 

Texte n°42 – Sombrombre 

Parce qu’on rêve tous, un jour,
au fond de nous,
tel un savant fou,
de sauver le monde,
de faire taire le mal,
d’arrêter les méchants.

Mais le vrai courage
n’est pas d’avoir des pouvoirs,
ni des gestes éclatants.

Il se cache
dans ce qu’on affronte
la peur,
l’égoïsme,
dans ce qu’on dépasse :
les ombres de soi-même,
et dans ce que l’on offre à autrui.

Et moi,
étrangement,
je l’avoue en souriant :
j’aime les méchants.

Ils me rappellent
le reflet que je lutte à taire,
les gardiens sombres
de nos propres ténèbres. 

Texte n°43 – Ce qui marche derrière 

Elle part sans prévenir au bord du jour qui penche,
Quand le passé s’efface et que le futur tranche.
Un souffle inconnu glisse entre chair et lumière,
Et tout ce que je fus se défait dans la poussière.

Je la sens derrière moi qui respire autrement.
Ce n’est plus la compagne aux gestes d’autrefois,
Son contour a changé, sa densité se fend,
Elle ne marche plus au rythme de mes pas.

Mon ombre s’est remplie d’un matin que j’ignore,
Ses yeux sont des miroirs où je ne me vois plus,
Et pourtant elle avance avec calme et décor,
Un monde qu’elle invente et que j’avais perdu.

Sous le ciel sans couleur je devine la mue
De l’ombre ancienne en l’ombre neuve et claire.
C’est moi qui disparais dans sa forme inconnue
Et c’est elle qui naît de ma lente prière.

Je la laisse passer car toute ombre est promesse
D’un visage à venir d’un nom qui se redresse,
Et quand elle s’étire au-delà de ma peur,
Je crois voir dans sa trace éclore ma lueur. 

Texte n°44 – Aphrodite 

Il fut un temps où ta voix résonnait en moi
Comme une musique que je connaissais par cœur
Chaque mot étais une note
Chaque silence une mélodie

Toutes tes lettres je les ai relues
Comme une histoire avec une fin déjà tracée
Les mots sont là, mais flottent dans l’air
Tels des feuilles mortes emportées par le vent

Je t’ai vu t’accrocher à des morceaux d’histoire
Comme à des débris après un naufrage
Ce n’est pas moi qui coule mais toi
Et je referme la fenêtre entre ouverte

Je ne veux plus de tes détours déguisés
De tes petits fils invisibles
Avec lesquels tu essaies encore
D’avoir une emprise sur moi

Tu tend la main dans le vide et tu réalise enfin
La lumière que tu suivais était la mienne
Trop centré sur toi, il ne te reste plus rien à sauver
Et maintenant tu ne suivras plus que mon ombre 

Texte n°45 – FIN 

Un disque obscurément vide
Apparaît et grandit vite dans les cieux,
En s’approchant des bastides.

Soudain se révèle un prélude aux ténèbres,
Un requiem silencieux :
Le jour s’éteint quand joue l’orchestre funèbre.

Un sombre rayon surgit,
Les cités brûlent sans chaleur, sans feu,
Avalées par l’infini.

Des démons, aliens immatériels apportent
L’Ombre Neuve sur la Terre
Matière noire répandue en cohortes.

Les autres villes, les campagnes,
Fondent aussi face aux monstres faits d’absence.
Bientôt suivent les montagnes.

Les armes, si inutiles, ont disparu,
Alors que sont en errance,
Les derniers êtres humains déjà vaincus.

La lumière est dévorée :
La Planète perd son bleu et l’espérance
Et devient obscurité. 

Texte n°46 – Créer 

Mauvaise idée
Ce soir
Des pensées sombres
Se déversent
Sur des feuilles blanches


Ce soir
J’assombris
Le monde
D’une encre noire
Ombre
Sillon définitif


Oh ! je sombre
En mon enfer
Au fur
Et à mesure
Que je m’indiffère
Que mon ombre
Créatrice
Cicatrice


Le monde

Me tue
À petit feu 

Texte n°47 – Faire ombre neuve 

Ce matin l’étrange est arrivé
Je me suis réveillé à l’envers
Je ne parle pas de tête renversée
Ni encore moins de pieds en l’air

Je suis toujours tête en l’air
Et les deux pieds bien à terre
J’ai juste l’air de dériver
Comme tout chambouleversé

Mon nord regarde au sud
Ma droite est devenue gauche
Et devant tant d’hébétude
Mon ombre se débauche

Corps et esprit se chevauchent
Si bien qu’ombre et peau se fauchent
La première prend toute latitude
De développer sa nouvelle attitude

Ainsi la vieille ouest poursuit l’est
C’est mon ombre qui vit à la lumière
Du corps et des idées elle se déleste
Pour vivre une vie à toujours entière

Elle n’a jamais été aussi forte et céleste
Lors de cette célébration funeste
Mon ombre neuve devient salutaire
Une lumière où je vis à ma manière 

Texte n°48 – Peut-être ai-je trahi 

Peut-être ai-je trahi, oui, comme la vague s’arrache de la mer et l’oiseau de la plume, peut-être ai-je trahi,
comme le soleil s’enfuit de ses rayons et les larmes de leurs nuages, peut-être ai-je trahi,
comme les pas effacent leurs empreintes, comme les bottes se sabotent, peut-être ai-je trahi,
comme les soldats à la guerre, quand on dit je n’ai guère, non je n’ai guère, n’ai guère le choix, comme naguère, quand je l’avais, ne l’avais pas, non ne l’avais, ne l’avais pas, ni les draps ni les rêves, ne les lavais pas, ont fini délavés, je les ai jetés et je t’ai, je t’ai, jeté avec eux, et je vous ai gardé,
peut-être est-ce trahir/ondelles, comment vont-elles sans se trah/irons-nous, quand nous irons, comme les hirondelles, traverser sans haïr et tralalilalère ?
Je t’ai jeté en l’air et t’ai, en plein été, trah/irresponsable, trah/irréconciliables, c’est cela les saisons, on sait puis on sait plus, on s’épuise, on s’est plu, pourtant, pour t’emprisonner, il a fallu, comme l’oiseau, s’arracher à la plume, peut-être ai-je trahi, comme le soleil s’enfuit de ses rayons et l’ombre de sa silhouette, peut-être ai-je trahi.
Ne fallait pas me suivre. 

Texte n°49 – Malfaiteur envivré 

Les lustres illuminaient l’horreur de ce ballet,
Les masques cachaient leurs visages défunts,
Les ombres reflétaient leurs sourires mesquins,
À ce bal enjoué, dès qu’un homme dansait

La réalité n’est pas d’une beauté,
Où les âmes brassent et vacillent à leur guise,
Mais plutôt s’entretuent, et ne font guère la bise,
La cruauté hélas est leur langage inné,

La musique grésille, s’effrite, s’use,
Les pas s’estompent comme la Muse,
Leurs rires se dispersent, se gèlent, se liquéfient,
Et la nuit s’éteint lors de cette agonie, 

Texte n°50 – Point de vue 

J’vois des ombres sur les murs de nos écrans,
des vérités floues, des reflets brûlants
et si la lumière, c’était juste un ecran bleu sur du noir?


Je scrolle donc je suis, mais suis-je encore moi ?
La raison bugge, le doute revient,
l’ombre neuve, c’est peut-être ce qui reste quand tout s’éteint.


Tout est connecté le corps, la pensée, la Terre,
mais l’ homme l’ ignore et suit le reste

tandis que moi je regarde les autre faire



Marre des morales qui sentent la poussière,
je danse dans l’ombre, j’y trouve ma lumière
la vie, c’est ça : brûler sans demander pardon.

Pas d’hashtag pour la dignité,
l’ombre neuve, c’est la liberté qu’on choisit,
quand on dit non à ce qu’on désire trop.

J’marche, j’respire, j’ressens le monde qui me touche,
mon corps pense avant mes mots,
l’ombre neuve, c’est ce frisson qui nous relie à tout. 

Texte n°51 – L’IMPOSTEUR 

Nouvelles ombres, nouveau matin,
Fraîches lueurs et frais espoirs,
Odeur douce aux arrières-goûts satin
Embrasent d’un coup la nuit noire.

Soudain, les vents s’en mêlent,
Les sens s’emmêlent et l’on sent même,
Par-delà les murs, les murmures de la vie,
Qu’atténueront les pensées.

Accablé par les souvenirs d’une nuit
Je fais sens des mots, sens des murmures.
Ce sens que l’on encense, ou qu’on couvre d’essence,
Puis qu’on l’oublie au pied du mur.

Soupirs alors se mêlent aux relents du café,
La nuit s’étire et de son lit tire le jour.
Aux allures de sauveur, l’imposteur accoure,
Tandis que l’autre s’éteint, ses ténèbres éclipsées. 

Texte n°52 – Panache 

Elle a toujours été là
C’est le fracas des vagues sur la grève
Le sifflement du train au loin
Par les champs, par la montagne, par les prés, par les villes
Par tout ce qui englobe et enserre et étreint
Le train siffle toujours
Toujours le train siffle
Toujours le train siffle et traîne derrière lui son panache de fumée
Toujours le train siffle et emporte après lui toutes les ombres
Le train siffle et un cheval lève la tête
Il épargne quelques mottes d’herbes qui dansent comme pour éviter les ténèbres qu’emporte ce souffle

Il est un silence planant, indicible
Un bourdonnement s’immisce dans tous les interstices
Un enfant passe au loin et laisse échapper un rire
Il voit, il sait bien plus que nous ne savons, et son regard noir suit les motifs des volutes de vapeur
Il est un silence planant, indicible
Qui monte du coeur des choses pour éclater en surface et dire :
« Je suis l’ombre de toute parole et je fais advenir le verbe »

Le train a quitté son panache de fumée
L’enfant a laissé tomber son rire
La montagne, les arbres,
les voitures lancées à toute allure et les pauvres gens assis aux coins des rues :
Tout est incandescent.
Le soleil semble cloué au zénith
L’absence a quitté le visible
Le monde est vide à craquer
Les fenêtres claquent
On pleure sans savoir pourquoi

Mais l’enfant,
L’enfant a vu le train
L’enfant a vu tous les trains
Et toutes les ombres
Et ces entrelacs nouveaux.
Il sait que du vide germent des idées neuves
Qu’une parole prend forme

Alors, le ciel s’assombrit
Le jour se tait
Elle est là, de nouveau
Comme elle a toujours été
–Absence fidèle
Ombre neuve–
Mais c’est au monde, désormais, de la suivre 

Texte n°53 – Elle s’appelait Personne 

On disait qu’elle souriait, autrefois.
Qu’elle parlait au vent,
comme à un vieil ami qui la comprenait.
Qu’elle dansait sous la pluie, pieds nus,
jusqu’à ce que le monde la juge.

Puis le monde l’a jugée.
Et son rire s’est éteint.
Petit à petit.
Comme une chandelle oubliée dans une église vide.

Elle s’appelait Personne.
Non pas parce qu’elle n’avait pas de nom,
mais parce que plus personne
ne prononçait le sien.

Les jours passaient sans elle.
Les saisons changeaient de robe.
Et dans chaque reflet de vitrine,
elle cherchait une trace de celle qu’elle avait été.

Elle avait aimé, jadis.
D’un amour entier, sans calcul.
Mais les gens ne savent pas quoi faire
des cœurs trop sincères.
Ils les brisent, puis les oublient.

Un soir, elle a cessé de parler.
Pas par choix.
Parce que les mots s’étaient lassés
de n’être jamais entendus.

Les passants la croisaient sans la voir.
Elle marchait pourtant au milieu d’eux,
comme une prière sans dieu,
une chanson sans refrain.

Ses yeux étaient des océans calmes,
où coulaient des naufrages qu’on ne voyait pas.
Son âme, une maison abandonnée,
où les souvenirs traînaient comme des fantômes.

Elle regardait les autres aimer,
comme on regarde une fête
derrière une vitre fermée.
Les rires passaient à travers le verre,
mais jamais jusqu’à son cœur.

Elle avait pour compagnie
la lune et quelques lampadaires fatigués.
La nuit, elle leur confiait sa douleur,
et le vent, par pitié, lui répondait.

Parfois, elle laissait traîner un sourire,
comme on laisse une fleur sur un cercueil.
Un adieu discret à ce qu’elle n’était plus.

On dit qu’elle s’est endormie un matin d’hiver,
dans un parc désert,
la tête posée sur son sac vide,
le regard tourné vers le ciel.

Les journaux ont parlé “d’une inconnue”.
Mais le ciel, lui, savait son nom.
Et ce jour-là,
même le vent s’est arrêté de souffler.

Les fleurs déposées sur sa tombe
ont fleuri plus tard que toutes les autres.
Comme si la terre avait attendu
de comprendre son silence.

Les enfants des rues chuchotent encore son prénom
quand la nuit les effraie.
Et certains jurent que, parfois,
on la voit marcher dans la brume,
avec ce même air doux,
ce même regard qui pardonne tout.

Elle s’appelait Personne.
Et pourtant,
elle portait en elle la douleur du monde.

Les dieux l’ont oubliée,
les hommes ne l’ont jamais vue.
Mais quelque part, entre le néant et l’éternité,
une lumière continue de brûler.

Faible.
Têtue.
Immortelle.

Parce que Personne,
c’était tous ceux qu’on n’écoute pas,
toutes celles qu’on n’aime plus,
tous les cœurs qu’on laisse derrière,
et qui battent encore. 

Texte n°54 – Ombre en couleur 

Pour ne plus voir mes ténèbres,
J’ai mis de la couleur à mon ombre,
Je l’ai paré de rubans et de dentelles,
Puis je lui ai dessiné un sourire
Comme un miroir à d’anciens rires.
J’ai contemplé mon œuvre,
Elle était belle, plus aucune trace d’ébène.
Alors, je suis sortie retrouver le monde.
J’ai affiché un soleil sur ma bouche,
Mon ombre me suivant comme l’arc-en-ciel après l’orage.
J’ai vu les gens m’accueillir comme si de rien n’était,
Satisfaits de cette nouvelle palette que je leur offrais.
Et pendant un instant, c’était comme si
J’avais toujours fait partie de cet univers,
Que nous évoluions sous le même ciel.
Mais les orages de l’âme sont les frères célestes des séismes :
Ils fonctionnent par répliques.
Les couleurs de mon ombre ne sont qu’un costume,
À la première secousse, au premier éclair,
Le déguisement s’est fissuré,
La pluie a noyé les couleurs.
Le monde a soupiré.
Le répit n’avait été que de courte durée.
Alors, je suis rentrée,
Avec mon ombre toute décolorée.
Je l’ai regardée, désolée.
On ne maquille pas l’anxiété avec du fard,
On apprend à danser dans les éclaircies.
Au printemps, les orages seront moins violents. 

Texte n°55 – Mon ombre bienveillante 

Depuis toujours, elle me suit — calme, discrète, insaisissable.
J’en suis le père, pourtant elle est mon autorité.
C’est moi qu’elle reflète, bien que nous en soyons tous dotés.
Vous pouvez la voir, mais je suis le seul à m’approcher de sa vérité.

Cette ombre, je ne l’échangerais pour rien au monde,
Mais il me faudra accepter qu’elle change.
Car à cette ombre, je suis marié — pour le meilleur et pour le pire.

Parfois grande et forte, parfois petite et frêle.
Des fois sombre, presque invisible, d’autres fois claire et contrastée.
Mais le serment qui nous unit garantit une forme de stabilité.
Et porte en lui la promesse d’un changement aligné à ma personnalité.

Cette ombre, c’est la morale — ma morale.
C’est elle qui me rend humain,
Mais c’est mon humanité qui la rend si belle. 

Texte n°56 – Ombre amie 

Elle m’a toujours suivie dans mes contrées
[Rigoureuse]
Depuis ce temps lointain où je suis née
Si elle accompagne chaque être vivant
[Mystérieuse]
Trop peu de gens savent qui elle est vraiment
Cette ombre qui attend élégamment
[Silencieuse]
Le moment fatal de notre tourment
L’appel froid de notre mort pour nous réconforter
[Respectueuse]
Nous saisir la main et à jamais nous emporter


Sois la bienvenue ma chère et vieille amie
Tu as fait peau neuve on dirait
Tu as revêtu ta dernière couverture
Endossé ton ultime rôle de clôture
Enfin je vois comme tu es
Je t’accueille au crépuscule de ma vie
[Heureuse]

Texte n°57 – Sans me blesser 

Pourquoi
J’ai le coeur si lourd
Quand tu me l’as vidé

Tu es parti
Et l’ombre de ton absence
Me suit comme je la fuis

Si j’avais su
Tu aurais pu
Entendre mes adieux

Maintenant je n’ai
Pour épaule
Qu’un carré de marbre

Et j’arrose de mes pleurs
Ce parterre de fleurs
Que tu nourris

Et je regrette

Je regrette
Toutes les secondes
Où je t’ai quitté

Je regrette
De n’avoir pas toujours
Ris quand tu riais

Je regrette
De respirer quand
La terre t’étouffe

Et ces regrets
Comme une ombre
Ne me quittent pas

Une ombre
Dans laquelle
J’aime sombrer

Je préfère
Me rappeler du meilleur
Quitte à revivre le pire

Ne plus souffrir
C’est un peu
T’oublier

Et moi
Je ne t’oublierai
Jamais

Mais je commence
Petit à petit
À comprendre

Que je peux te garder
Dans le creux de mon coeur
Sans couler

Que tu seras là
Même si mes pensées
Sont loin de toi

Et que t’aimer
Ce n’est pas
Me détester

C’est dur
Tu sais
Les épreuves sans toi

Sans ton regard
Qui est fier
De moi

Mais tu serais fier
De savoir
Que ton ombre a changé

Maintenant je peux
Lui tenir la main
Sans me blesser 

Texte n°58 – Sans titre 

Il pleut là
partout
dans la lumière

tu es depuis toujours
ma couleur

mes certitudes barbouillées
mon amour au centuple
tu respires la vie
à contre-jour

tu es
soleil d’hiver
sur carreaux fatigués

dans les silences tenus
sans crainte
de ce que révèle le vide
à travers
la vitre fendue
les brumes accidentées
on sème
à l’envers
sans temps

ton ombre se retire
de moi comme une vague
j’ai voulu bouturer
jusqu’à tes parties sombres


éclipse moi 

Texte n°59 – Elle 

C’est elle que l’on remercie quand le cœur est plus léger,
Quand nos peurs se font moins floues,
Que notre destinée se dessine avec précision.
C’est elle qui nous suit lorsque l’on a pansé tous les coups
Et que nos pas s’enchaînent sur le chemin de guérison,
Là où les mauvais souvenirs sentent le brûlé.

C’est elle que tout le monde voit dans la rue,
Quand notre peau se fait plus rose.
Elle se tient toujours debout, sans jamais vaciller.
C’est elle qui encourage, c’est la première qui ose,
Sans apparat, sans fioritures, elle court toujours à nos côtés,
Elle est d’une obscurité scintillante, l’ombre neuve … l’ombre nue. 

Texte proposé par Olivia Escach, Jury – Mon ombre nouvelle

J’ai une ombre nouvelle
Ne marchez pas dessus
À midi au soleil je me confonds avec elle
Je me drape de son léger pardessus
Sa fraîcheur est meilleure que celle d’une ombrelle
À la lueur de la lune pleine ou en rondelle
Elle me voile d’un crêpe sombre en fins tissus
À mon âme est une ombre nouvelle
À mon âme cousue
Elle a ton rire en grelots, tes manières
Élégantes sur mon passage
Elle danse comme toi sur les pierres
Chaque jour je lui donne ton visage
Sur les flaques elle papillonne
Comme deux ailes de passage
Frôlent l’eau dans un souffle qui frissonne
À mon âme est une ombre sage
À mon âme elle fredonne
Tu es partie mais ne me laisses pas nue
Tu me lègues une ombre fraternelle
Elle ne rôde pas dans la rue
Elle n’habite pas la chapelle
Elle ne dort pas dans son urne
Ton ombre me suit comme personne
Pour que l’on joue encore comme des demoiselles
À mon âme est une ombre nouvelle
Ton ombre je suis comme personne

À ma Dédel

Texte de Calibrage par La Rathure – 1,2,3 Soleil

Dans le jardin s’est posée une ombre nouvelle,
Ce sont pourtant les mêmes arbres qui le bordent,
Aux branches, la même balançoire chancelle,
Le même linge sèche sur la même corde,

Les enfants ont arrêté le un, deux, trois, soleil,
Figés dans des figures désarticulées,
Equilibre sur un pied, voire sur un orteil,
Tout pour ne jamais avoir à reculer,

Les verres pétillent sur la table plastique,
Le parasol reste emmitouflé dans sa housse,
Les chips renversée dans un bol – c’est plus pratique –
Les bières servies ont encore de la mousse,

L’ombre s’est installée dans le fauteuil vide,
Défroissant son manteau autant que nos rides,
Elle nous a souri,
Et la vie a repris.


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Et merci à BB2, Florent, Idéesdodues, Nicole, Thomas, et un anonyme de soutenir le projet La Rathure sur Tipeee !

2 Commentaire(s)

  1. ravie de vous découvrir

  2. […] jurys de cette édition sont les lauréat·es de la précédente édition […]

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