Les Égoèmes

Les Egoèmes #10 – De glâce

image_pdfimage_print

Les Egoèmes, c’est un concours de poésie que j’organise chaque début de mois sur Instagram.

Pour cette dixième édition, je propose aux participant·es d’écrire sur le thème « De glâce ». Quand grâce et glace sont fusion, est-ce que chaque lettre fond en sublimation ?
Les participant·es sont libre d’interpréter le thème.

Pour cette édition, les participant·es ont une semaine pour participer, en envoyant leur participation à concours @ la rathure . fr avant le mercredi 8 février 2023

Comme pour l’édition précédente, je proposerai un texte de calibrage pour aider les jurys dans leur travail de notation.

Pour vous tenir au courant des actualités du concours, ça se passe sur Instagram : @larathure

Les jurys de cette édition sont des participant·es de l’édition précédente et une invitée puisque Patrick Aubert, deuxième prix de la neuvième édition, qui a déjà été jury sur une édition précédente a souhaité offrir sa place :

JuliePott-W (Instagram) (1er prix)

Jessica Apirene (@Instagram) (3ème prix)

Emmanuelle – Di.versifier (@Instagram) (Invitée)

Vous pouvez retrouver les présentations des membres du jury sur Instagram : @larathure

Bonne lecture !

Texte numéro 1 – De glâce – Cho7

Sa glaciale majesté
J’aimerai tant sortir
De cette prison gelée
De cette vie, de l’ennui
De glâce, libérez moi
De ce corset d’hiver
Je veux sortir du froid
Délassez ces lacets
Qui me lassent, enlacé
Par la nuit, par le frais
De glâce, votre majesté

https://www.instagram.com/cho7_3000/

Texte numéro 2 – Vérité apoétique – Dominique Theurz

S’i’ou plaît, accordez-moi de glisser sur la patinoire de vos déboires. Je transformerai chacun d’eux en un tremplin à gadins. Mais pas n’importe lesquels ! Des gadins à réception d’un triple axel ! Je chuterai au ralenti et avec élégance. Une friandise inouïe de jour comme de nuit. Je chuterai au ralenti, mais en brisant la glace. Ramasser une gamelle ne sera plus humiliant. Juste une question de position dans l’espace.

De grâce, accordez-moi de vous dévisager dans le miroir de vos désarrois. J’y lirai chacune de vos angoisses et les maquillerai avec classe. Bientôt, elles s’effaceront et joueront à lisser vos humeurs. Plus de feu, plus de glace ! Juste l’audace de la sérénité, la chaleur des sourires épinglés.

Je vous prie de me remettre vos cornets de glace. Ils dégoulinent et vous dégueulassent. Rien de tel pour chuter dans l’estime, pour réactiver les déprimes. Je sais, sur deux paragraphes, j’ai promis que tout allait aller. Je maintiens, à la condition qu’aucune gourmandise glacée n’échappe à mon seul festin.

Pour vivre heureux, confiez-moi vos glaces, toutes vos glaces. Je m’occupe du panache. 

https://www.instagram.com/dominiquetheurz/

Texte numéro 3 – De glace – Guillaume Ouvray

Je n’ai jamais su parler à mon père
Lui non plus
Comme deux étrangers qu’on aurait mis dans la même chambre
J’ai un souvenir de lui s’enfonçant dans la forêt pour récupérer le ballon
De son corps d’homme puissant, endurant
Je me souviens aussi l’été au bord de la piscine
Ma mission était de le mettre à l’eau
Je n’y arrivait pas, même avec les copains
Un jour vers mes 16 ans j’y suis arrivé, plusieurs fois
Et le jeu s’est arrêté
J’avais grandi
Les mots toujours absents
Je regarde mon père et j’ai peur
À mes 22 ans mon père passe du noir au gris

Et moi je suis devenu un homme
Il ne peut plus courir aller chercher la balle comme dans mon souvenir
Je le vois perdre sa mobilité, seule preuve de son existence sans des mots pour moi
Il perd et les mots ne sortent pas
Il me sert contre lui, je sens un mur fragile, un mur fermé comme une bouche sans mots
Je sens son coeur battre caché la dessous
Je sens la solitude

Mon père gagne son premier combat
Il garde ses cheveux,  ses sourcils
Mais le combat lui fait perdre encore sa mobilité
Il se rapproche de immobilité
Son corps s’efface
J’ai peur
Des mots sortent pour la première fois de sa bouche, de son corps
Il a ouvert la porte
Et je découvre mon papa
À 24 ans
Le corps de mon père s’ouvre
Les muscles ont fondu et on ouvert une bouche entre les côtes près du coeur
Comme si la prison commençait à céder, crouler sous le poids de tout ce qu’elle renferme
À mes 25 ans mon père combat encore
J’ai peur
J’ai peur de perdre
Cette fois c’est son visage qui se crispe, se verrouille et la bouche qui ne peux plus sortir de mots
Cependant cette fois la porte était ouverte
Tu allais parler papa
Tu allais me parler et ta bouche s’est figée
Ton visage en image ton corps qui s’écroule
Tu es fort papa je me rapelle de ton corps au bord de la piscine
Je me rapelle être en sécurité autour de cette masse muette
Ce combat là tu dois le gagner
Tu dois sortir
Trouver une petite ouverture
Tu as trop gardé c’est trop pour un homme
Les muscles ne peuvent pas contenir tout ce que ton coeur expulse
Ton corps lâche papa
Je suis là
Je ne veux pas que tu deviennes une image
Je veux que ton corps me parle encore
Retrouve ta langue
Tu n’es pas seul
Je ne veux pas que tu reste de glace
Je te porterais papa 

https://www.instagram.com/guillaume_ouvray/

Texte numéro 4 – Illusion – B-HOLDER Sandrine

Derrière ton regard impassible et hautain,
J’ai senti brûler mille feux ardents.
Une seule étincelle et nos corps enlacés
Jamais repus de ses saveurs exquises,
De nos caresses sublimées,
De ta sensualité bestiale,
De mes désirs jusqu’ici inavoués.

Je me liquéfiais en ta seule présence…
Désormais, je brûle, j’ai froid, je meurs
De ta totale indifférence.
Accorde-moi une dernière faveur,
Comme au temps passé,
Avant que ton esprit ne s’évapore
Vers de sombres nébulosités,
Aime-moi le temps d’un songe
Même si pour cela il te faut me leurrer.

Une dernière danse, un dernier baiser,
Peu importe le peu qu’il me reste,
Je m’éclipserai sans plus de formalité,
En un souffle discret.

https://www.instagram.com/sandrine.b.holder/

Texte numéro 5 – Vénus – Patrick Aubert

Toi la femme lointaine et pourtant si présente,
Dans la pierre sculptée, la nudité sans fard
De ton corps opulent serait presque indécente,
Mais la sublimité t’habille d’un regard !

Ta peau de marbre blanc patinée par le temps
A la pâle froideur d’un soleil automnal.
Nul ne sait tes pensées, ni ce que tu attends,
Mystérieuse inconnue, là sur ton piédestal !

Tu sembles si distante, à la fois si fatale,
Que tu fais fantasmer notre imagination,
L’espace d’un instant suave et sentimental.
Oui, tu incarnes l’art, l’indicible émotion !

https://www.instagram.com/patito75009/

Texte numéro 6 – R et L – BFlow

Si dans ta chute tu t’attaches à ce qui est lesté
Si ton ascension dépend de ce qui est resté
Si tu ne combats ta cage qu’en opposant une rime
Si tu peaufines ta poésie en y apposant une lime
Si tu t’unis modestement à ceux qui t’égarent
Si tu punis aussitôt tous ceux qui t’égalent
Si tu éteins hâtivement tout ce que tu clames
Si tu attises sans cesse tout ce que tu crames
Si tu fais face à toutes tes fautes en pliant
Si tu fais face à toutes tempêtes en priant
De glâce ne confond pas davantage R et L
Que tous ces non-sens soient à jamais irréels

https://www.instagram.com/florent_beauvois_page_auteur/

Texte numéro 7 – Etat de glace – Seulementsamuel

Encore dans la nuit, vent du matin,
Les membres engourdis, seul dans le rien.
Etat de glace, fugace rayon de soleil,
Reflet à la surface, face aux merveilles.
Pas d’infos, douche, regard dans la glace,
Foule qui s’amasse, juste le monde qui se dessine,
Le froid dans l’échine, la nature fait place
Les montagnes remplacent les usines.

Loin du quotidien qui menace
Trouve ton état de grâce
Dans les états de glace,
Souffle, respire, ressens les spasmes de l’Espace.

Encore marcher, tiédeur du midi,
Le corps éprouvé, vague d’apathie.
Jambes qui s’ankylosent, oublie la torpeur,
Les écrans, le boulot, le bruit du téléviseur,
Métro plein de crasse, juste les plaines blanches,
Des montagnes au loin, des meutes éparses,
Pas de stress ou de strass, seul le ciel du dimanche,
Sans avion ni humain, les nuages sont comparses.  

Proche de la faune et la flore,
Trouve ton état de grâce
Dans les états de glace,
Souffle, respire, avance encore.

Plonge dans la nuit, sommeil de plomb,
Bonnet de laine, polaire, gros blouson.
Corps emmitouflé, chaleur salvatrice,
Pas de pilules, de repos factice,
De pneus qui crissent, de cris, de voisins,
De couloirs étroits, juste des idées fécondes,
Un brouillard laineux, le soupir marin,
L’esprit brumeux, les rêves vagabondent. 

Dans les heures où tu te démène
Trouve ton état de grâce
Dans les états de glace,
Souffle, respire, car la vie est une aubaine.

https://www.instagram.com/seulementsamuel/

Texte numéro 8 – De glace – Oni Rick

Je reste de glace lorsque la buée prend place au sein de la boule de verre, qui recouvre mes vers. Car cela veut dire que se figent ses flocons, dans mon balcon mortel en arc en ciel. Le froid de mes émois en gélification, leur broie du noir conservé en flacon. Je veux garder mes couleurs, sentir les fleurs et fuir les pleurs. Alors j’ai placé mes sentiments sous vers, pour qu’ils ne me laissent plus de glace. Car ma boule à neige en éclats de vers, cicatrise chaque brisure de glace. 

https://www.instagram.com/oni_rick/

Texte numéro 9 – Sans titre – Matthieu ?

Quoi de mieux pour accompagner
Le vrombissement de mon cœur
Que le calme d’une seule heure
Consolé par un drap gelé ?

La forêt me confie d’un ton railleur
Des idées qui perturbent mes humeurs.
Quand enfin se tut la clameur,
Elle m’observait.

Figure malingre et mélancolique
Sa peau de cristal scintille. Angéliques
lèvres gercées, bordées de mèches jais
Noircissant la dureté de son trait.

Son œil vogue avec les flocons fuyants
Marre brune aux abysses chatoyantes.
Je songe à plonger pour mieux m’y noyer
Dans l’espoir de le fixer à jamais
       
Les sapins s’agitent suivant
Le ruisseau et son sifflement.
J’épouse son cours, amusé.

Comme j’aimerais goûter cette grâce
Brûler mes lèvres du froid de son souffle
Mourir d’hypothermie pour, un instant
Rêver d’occuper pour elle une place.

Les larmes célestes dissipent le mirage
De glace, ne la laissez pas se morfondre !
Des moments demeurent sans âge
D’autres sont condamnés à fondre.

Goutte fatale de nuage
Réchauffant d’un trait passionné
Cette âme qui ose t’aimer.

https://www.instagram.com/ver_sificatio/

Texte numéro 10 – Dérèglement climarctique – Antigone de Fausocle

De glâce,
ne me transforme pas en glaçon
ne me condamne pas aux nages éternelles
dans un petit caisson
où il suffirait d’un seul geste
pour me faire sauter
me confondre
me liquider

De glâce,
dans ce jeu de miroir
où s’abîment mes pâles reflets
vois plus loin que toutes ces parties
émergées — ne te fie pas au gel
qui me dresse les cheveux
sur la tête : ma polaire renferme
le feu et mes formes
flamboyantes

De glâce,
pas de casse ni de réchauffé
prends le temps de l’expédition
cramponne-toi
laisse-toi glisser
plonge sous les surfaces :
tu verras que je ne suis pas
toute blanche ainsi étendue
— sauvage

https://www.instagram.com/antigone_de_fausocle/

Texte numéro 11 – Sans titre – Arsinoé

Tu m’as dit à l’oreille
Avec l’aplomb des fous
Que le temps te manquait
Pour achever ton rêve
Et mon cœur s’est brisé.

Pourtant je t’ai aimé
De m’avoir fait confiance.

Je veux sentir en moi
La passion de ton corps
La douceur de ton âme
L’éclat de ton esprit
Pour recréer des astres.

Reste en vie maintenant
Que je m’offre moi-même.

https://www.instagram.com/arsinoeofficiel/

Texte numéro 12 –  Neuf mois – Abab

De si nombreux compliments
Des mots de plus en plus charmants
Je pourrai y succomber
Me laisser enivrer
J’entrouvre légèrement la porte
Imaginons que je sorte
Je montrerai mon minois
Vous le pensez joli
Mais il est peut-être de guingois
Cette douce mélodie susurrée
Est ma berceuse adorée
J’y entends vos plus chers souhaits
Vous me poussez à sortir
Me raconter nos futurs rires
J’ai presque envie d’y croire
Me laisser tenter
Faire mon éclatante entrée
Dans ce monde que vous me chantez
Ce soir promis je montre mon nez
Préparez-vous mes adorateurs
Je ne vous donne pas d’heure
Votre princesse tant convoitée
Bientôt saura vous enchanter

https://www.instagram.com/abab_7893/

Texte numéro 13 – La Danse Éternelle de l’Hiver – Orso

De glace, l’hiver s’exprime
Sur les montagnes, les arbres et les plaines
Brillant sous les rayons du soleil
Il peint le monde d’un blanc éternel

Les gouttes d’eau se figent en cristal
Les paysages sont transfigurés, magiques, presque irréels
Les flocons tombent du ciel en une danse lente
Emmitouflant le monde dans un manteau blanc immense

Mais sous la surface, la vie bouillonne
Les rivières coulent, animées par leur puissance
La glace se brise, se reforme sans cesse
Dans un cycle éternel de beauté et d’abondance

De glace, l’hiver nous envoûte
De son monde immaculé, où tout semble parfait
Et nous rappelle la force et la fragilité
De la nature, source d’éternelle poésie.

https://www.instagram.com/orso_et_louve/

Texte numéro 14 – Amour céruléen – Isla

Voyageur imprudent
Tes baisers côtoient l’azur de l’horizon
D’où l’essence d’éternel serpente à travers les lèvres pourpres,
Ces terres silencieuses t’accueillent
Don subtil accordé aux amoureux

Désormais esseulé,
Égaré sur les côtes de givre
Ta supplique ne trouve pour écho
Que les affres de la distance

Larmes glacées, brise-coeur,
Les rivages désolés se détournent
Déserts immuables
Souviens-toi du sublime

Contemple les icebergs scintillants
Étoiles d’une mer pétrole
Guides des pèlerins aux joues salées
Sur l’éther des nuits immortelles

https://www.instagram.com/lisa.rit/

La Rathure – Vil’

Je suis le regard glacial du bitume,
Un de ces immeubles aux yeux de verre,
Aveugle aux souffrances qui nous accoutume,
À baisser le regard devant l’envers,

Je suis les sourdes oreilles des murs,
Insensibles aux cris d’effroi,
Qui nous implorent dans les murmures,
Las, des corps transis de froid,

Je suis la gueule béante
D’une bouche de métro, d’aération,
Qui crache l’haleine puante,
De tous ces visages sans réaction,

Je suis l’odeur de l’argent,
Insaisissable à ceux qui en ont,
Le reniflement d’un indigent,
Qui ne connaîtra que l’effluve du non,

Je suis la touche où se retrouvent,
Ceux qui s’empoignent au quotidien,
Ceux que les trottoirs éprouvent,
Et auxquels nos mains ne tendent rien,

Je suis la fierté d’un chœur de grâce,
Dont le courage a supplié,
Le bien urbain au cœur de glace,
Qui, jamais, n’a su plier.


Soutenez les Égoèmes sur TIPEEE grâce au don mensuel pour permettre de développer cette rencontre poétique : mise en place d’un prix des tipeurs, d’un prix du public et de bien d’autres choses…

Merci à Alep, D., Idéesdodues, Mathilde, Nicole, Roselivres, Thomas et un anonyme de m’y soutenir !


Vous pouvez aussi me laisser dans les commentaires :
Des idées de thèmes pour les Fais Dix Vers

1 Comment

  1. […] Les jurys de cette édition sont des participant·es de l’édition précédente : […]

Laisse un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Prochain texte :

0 %