Les Égoèmes

Les Égoèmes #26 – Ami·e de rien

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Il est venu le moment de lancer la 26ᵉ édition des Egoèmes !

Et le thème de ce mois mai c’est “Ami·e, de rien”.
Une amitié lointaine, inexplicable ? Une solitude misanthrope ? Un lien qui est tout ? Un merci qui s’efface… Libre à vous d’explorer ce thème qui succède à la rivalité !

Comment participer ?

Les participant·es ont une semaine pour envoyer leur création.

Date limite : jeudi 8 mai 2025 à midi
Adresse d’envoi : egoemes @ larathure.fr (sans espaces)
Conditions de participation : suivre les comptes Instagram @larathure et @lesegoemes .

Comme à chaque édition, un texte de calibrage sera partagé pour aider le jury dans son évaluation.

Le jury de cette édition

Les jurys de cette édition sont les lauréat·es de la précédente édition :

Retrouvez leur présentation et toutes les actualités du concours sur la page @lesegoemes.

Restons bons ami·es, écrivons ensemble !

Texte n°1 – Archipel 

J’ai vu un pauvre homme, seul, prostré dans la rue
Agitant sa sébile au-dessus des pavés
Ignoré jusqu’au dernier rayon disparu.
Des pièces, bouteilles et haillons délavés

Dans son royaume, pas d’ami, seuls des passants
Vite, en chapelet, traînent leurs chairs et se pressent
Quel arôme cette vie d’ermite et d’ivresse.
M’étant attelé à sa suite, réticent

J’ai dit : « Pourquoi porter le monde sur ton dos ?
Atlas, ne voudrais tu avoir des compagnons
Partager des joies fécondes et ton fardeau ? »
« Hélas, j’ai abandonné ces illusions »

« Et chérir cette solitude adamantine ?
Comme tu t’infliges d’inutiles souffrances
A remplir cette vie de ta seule présence
Faite de tant de violences et d’épines. »

Il sourit et lève son regard vers le ciel
Dit que ses amies sont les constellations
Les étoiles commandent, il répond, fidèle.
Il n’y a ici aucune damnation
Car être son propre ami, c’est être un archipel. 

Texte n°2 – Amitié Infâme

Ma confiance s’établit loin de la foule
Je chemine à pas feutrés dans l’ombre;
J’ai la frousse de retentir dans le moule,
Jets de mon univers au revers sombres.

Comme un martyr dénoue la laison à sa douleur
Je m’éloigne de mondanités rompues au malheur;
Evinçant ces infâmes amitiés factices,
Je vire ces bourreaux remplis de vices.

J’embrasse allègrement un retrait misanthrope et serein
Où les joies du silence ont remplacé les vils refrains;
Vieilles mélodies hargneuses de haine et de trahison,
D’opprobes et tortures qui ont rythmé mes relations.

De tristes mésaventures sociales qui ont décliné leur morsure
Dans un spectacle odieux d’amicalités pleines de bavures;
Aux actes soustraits de bienveillance prompte et évidente,
C’est la loi des ami.e.s perfides qui font morfler et s’en vantent.

Mes songes agités qui écopent de harcèlement malveillant
Et ma mémoire fragile peine à déclasser ces souvenirs dissidents;
Des craintes qui résonnent dans mon cœur fracturé par habitude,
Et l’entaille géante de ma sociabilité en berne cherche béatitude. 

Texte n°3 – Il ne disait pas 

Il ne disait pas :
« Je suis ton ami. »
Il ne disait pas :
« Compte sur moi. »
Il ne disait pas grand-chose, en fait.
Mais quand le jour s’écroulait un peu,
quand les pensées tournaient en rond
comme une horloge sans aiguilles,
il passait,
il s’asseyait,
écoutait.
Et je me sentais moins cassé.
Je pense à lui,
A mon ami de rien,
Qui valait quand même
Un peu plus que tout. 

Texte n°4 – Mon diable 

Je me souviens de tes chorus
Pulsant le sang de mes bonus
Entre adieux et bonjours
J’ai dans le coeur ton vieux sabot
Qui chante encore cet air nouveau
Comme un toujours

J’ai réveillé le lion en cage
Avec les muscles de l’orage
Entre joie et torpeur
J’ai pris le rythme des tambours
Dans les allées de nos retours
Comme un vainqueur

En resserrant le grand linceul
J’ai mis du temps entre nos gueules
Entre mal et plaisir
Ce crépuscule est un matin
Qui laisse faire le va-et-vient
Comme un désir

Je t’adore encore
Mon diable d’amour
Au corps à corps
Avec mes velours
Trésor
Sourd. 

Texte n°5 – Ami·e, adieu 

Je ne m’excuserai pas
Pour le temps gâché.
Je suis bien las·se,
Des reproches répétés.
J’ai affronté tes insultes,
Avec le parapluie du pardon
Mais aujourd’hui, cette lutte
M’a rongé·e, de ne pas savoir te dire non.
Et les rides pèsent sur mon front,
Creusés par les non-dits.
Je suis fatiguée de t’épargner mes émotions.
Alors, mon ami·e, je te dis :
Merci pour les beaux jours
Sans rancune pour ceux d’orage.
Je pars sans retour.
Je ne serai plus ton otage.
Pour les rires des soirs gris,
Ami·e, merci.
Pour l’oreille toujours en soutien,
Ami·e, de rien.
Pour les mots injurieux,
Ami·e, adieu. 

Texte n°6 – À l’anonyme, camarade de son monde 

L’homme sous un pont plus heureux que celui des villes.
L’homme sous un pont, à qui l’on reprochera la vie.
Celui, d’un air urbain, qui vanne le monde autour ;
Dans le doré de sa tour, lui, n’y connaît rien.
Compromis promis au profiteur,
Profiteur d’un monde détruit,
Qui vit sans chaleur, dansant la rancœur.
Mais l’argent montre bien l’illusion,
Qui promet la popularité :
Monde de monnaie
Qui crache sur l’être aimé. 

Texte n°7 – L’ami silencieux 

Il arrive dans le silence,
Comme un souffle, un rien du tout,
Pas de promesses, pas d’avance,
Juste un sourire un peu flou.

Ami de rien, sans importance,
Ni drapeau, ni grand discours,
Il s’assoit dans l’indifférence
Des jours sans soleil ni velours.

On ne le cherche pas vraiment,
Il n’a ni nom, ni souvenir,
Mais parfois, dans un moment,
Il sait comment faire sourire.

Ami de rien, ombre légère,
Compagnon de mes détours,
Il ramasse mes colères
Et les transforme en velours.

C’est un éclat dans la grisaille,
Un mot simple, un regard doux,
Il ne promet jamais bataille,
Mais il reste, même à genoux.

Ami de rien, ami de tout,
Invisible et essentiel,
Il est la main tendue, surtout,
Quand la vie devient moins belle.

Alors je lui dois tant de choses,
À cet ami venu de rien,
Qui fait fleurir, même morose,
Le jardin secret de mes lendemains.

Texte n°8 – L’arbre déraciné 

Des promesses,
Des sourires de tristesse.
Un cercle de solitude,
Une amie d’inquiétude.

J’écrivais notre histoire,
Mais tu gommais ma mémoire.
Tu brisais sans cesse le miroir
Où mon reflet cherchait l’espoir.

J’ai connu frissons et chaleur,
Trahison, pleurs et frayeur.
J’ai connu l’abandon, le mépris,
L’humiliation, le rejet, sans répit.

Tu profitais de mon silence
Pour briser totalement ma confiance.
Tu répandais tous mes secrets
Et me servais un plat de regrets.

T’étais une amie de printemps,
Un arbre déraciné par le vent.
Un jour de fête sans soleil,
Un sourire qui s’efface au réveil.

Peut-être dans une autre vie,
Tu deviendras celle que j’avais choisie.
Mais pour préserver ma paix intérieure,
Je dois m’éloigner de ton ombre et de ta douleur. 

Texte n°9 – À Annick 

Tant pis pour le soleil, puisque tu es ici.
La chaleur de ton cœur de bonheur nous emplit.
Depuis toutes ces années que je te connais,
Je ne t’ai jamais vu nulle méchanceté.

Nous avons vécu, chacune, des moments sombres.
Ce beau lien entre nous ne s’est jamais défait
Ta patience infinie a su le protéger
Par ta lumière, tu as éloigné les ombres.

J’aime ton rire que tu lances et qui emporte,
Qui diffuse alentour ton amour de la vie,
Quand tu as un peu trop bu le vin des amis,
Qui me rend heureuse par la joie qu’il apporte.

Tu connais la nature humaine et ses faiblesses.
Tu pardonnes quand tu aimes, telle est ta noblesse.
Tu regardes devant toi telle une princesse,
Tu poursuis ton chemin même s’il te blesse.

J’admire ta constance et ton sens du défi.
Tu as su évoluer et changer de vie,
Malgré les embuches que tu as rencontrées,
Sans abandonner qui tu es, sans te renier.

Je voulais tant te dire, j’aurais tant à citer,
Il faudrait trop de temps pour faire ton portrait
Tu as tant de facettes, ce qui te fait unique
Je suis si fière d’être ton amie, Annick 

Texte n°10 – Rondeau de l’amitié 

L’amitié ?! C’est une chose rare !
On n’a pas des amis partout…
J’ai connu mon ami au bar :
Moi, j’ai payé, lui, il a bu !

On a joué au billard,
S’il veut, je paie ; s’il chante, je joue.
L’amitié, c’est une chose rare :
On n’a pas des amis partout !

Nous sommes sortis sur le boulevard…
J’ai dit : « Venez, on va chez nous ! »
Il est maintenant dans le boudoir —
Avec ma femme ! Les deux perdus !

L’amitié, c’est une chose rare… 

Texte n°11 – L’amie 

La mie de pain,
Je la malaxe
Entre les doigts,
Ça me relaxe,
Et je lui dois
La bonhomie
De l’embonpoint
Qui est le mien ! 

Texte n°12 – Celle qui ne tient que l’absence 

Elle est venue quand tout s’effondrait — muette,
Drapée d’un vent qui ne portait aucun nom.
Née d’un regard que l’univers rejette,
Elle a logé son ombre en mon abandon.

Ni cœur, ni voix, ni larmes à dissoudre,
Elle traverse l’âme — et ne s’y pose pas.
Le monde meurt, et c’est à peine un soubresaut
Pour celle qui s’endort là où l’on vient pour coudre
Ce que le sort déchire et que le temps efface.

J’ai tendu mes silences comme on tend des filets,
Espérant y capturer une lueur —
Mais rien, sinon ce vide où tout finit muet,
Ce désert fraternel, sans poids, sans chaleur.

Elle marche avec moi comme un deuil qui s’ignore.
Je dis « bonjour » parfois — elle ne répond jamais.
Son nom n’est pas écrit dans la cendre des morts,
Ni dans les plis du ciel où s’effondrent les Mais.

« Amie de Rien », ainsi je l’ai nommée.
Elle n’attend ni grâce, ni pardon.
Elle est ce reste qu’on ne peut aimer,
Et qui pourtant, demeure à l’unisson.

Les autres ont fui quand la lumière a chu ;
Elle, non. Elle est restée — debout,
Comme une croix que l’on ne voit plus,
Mais que l’on sent peser, chaque jour, un peu plus. 

Texte n°13 – Bon chic bon genre 

Je ne saurai dire ou ce tram nous menait
Dans cette ville de l’Est aux stigmates guerriers
Mais son parfum me titillait
Elle feignait de me regarder en regardant à coté

Tout pour bien commencer une approche un essai
Lunettes mouches fumée, cheveux bouclés
Et puis elle était drôlement bien habillée
Ce coté, ce petit coté, BCBG

Elle avait de belles manières
Ses longs bras mêlaient de l’air
Et son parfum, son parfum m’entêtait
Sérieux, je suis trop sensible du nez

Elle n’était pas farouche
Ça se lisait sur sa bouche
Alors je crois que j’ai dit
En anglais pardi, « it’s beautiful here »

Mon accent étant ce qu’il est
Les autres collectivement se sont moqués
Et c’est là qu’on a découvert
Qu’elle parlait français, super

La conversation s’emballait, les rires fusaient
Ses joues se sont empourprées et…
Lorsque de la passion animale il a été sujet,
Elle déchaussa ses lunettes , ses yeux bleus maquillés
M’ont regardé d’un drôle d’air…
Dommage, j’étais accompagné…. 

Texte n°14 – Pour rien, pour toujours 

Bouée salvatrice dans cet océan de frissons,
Vagabondant à tes côtés comme un jour sans fin,
De toi je n’attends rien, qu’une simple attention,
Unis, nous faisons front et renforçons nos liens,

Rappelle toi de ces instants, seuls et acculés,
Absorbés par ces regards, à jamais destructeurs,
Faible lueur, dans ce monde régi d’hostilité,
Frimas de chaleur, dont nous sommes les compositeurs. 

Texte n°15 – Abir et Smadar 

J’ai dans mon cœur Abir, j’ai dans mon cœur Smadar
Elles auraient pu détruire les murs qui nous séparent
Elles sont venues au monde sur une terre dévastée
Pas à l’abri des bombes, nées pour se détester

Dans leurs livres d’école, on cultive l’ignorance
On divise, on isole, on loue l’intolérance
Elles n’étaient pas amies, le seraient devenues
Puis les voilà unies, inconnues, ingénues

Sur les pavés rougis de Jérusalem Ouest
Le corps de Smadar gît, victime d’un sort funeste
Sur les pavés rougis d’un coin de Palestine
Le corps d’Abir sans vie est l’écho d’une routine

Le sang de deux enfants a de nouveau coulé
A qui le tour ? Au suivant… La vie s’en est allée
Les familles ravagées font face à l’insensé.
Qui peut les soulager, ces cœurs blessés, cassés ?

La tristesse est immense ; elle côtoie la colère
Dedans, ça crie vengeance quand le cœur est en guerre
Représailles, punition, on exige un coupable
Pour la réparation d’un crime irréparable

J’ai dans mon cœur Rami, j’ai dans mon cœur Bassam
Deux pères et deux amis, l’un Shalom, l’autre Salam,
Ils sont venus au monde sur une terre dévastée
Pas à l’abri des bombes, nés pour se détester

Les pères de deux enfants arrachées, sacrifiées
Ont fait don aux vivants de ne pas se venger
By the power of pain, faire des ponts, pas des murs
Le pouvoir de la peine est une force, une gageure

Cette énergie puissante, l’intelligence du cœur
Est la voie non-violente que tous deux suivent en chœur
Unis, main dans la main, ils parcourent le pays
La bannière de l’Humain flotte dans leurs esprits

J’ai dans mon cœur Smadar, j’ai dans mon cœur Rami
Père et fille, étendards, preuves qu’on peut être amis
J’ai dans mon cœur Abir, j’ai dans mon cœur Bassam
Père et fille font fleurir le Shalom, le Salam 

Texte n°16 – L’Amitié est comme l’Amour 

Amie de rien.
Amie pour rien.
Amitié unique de sens.
Amitié sans sens.
Sensation sans permission.
Sensation avec punition.
Tu m’as trahie,
Durant toute ma vie.
Maintenant, je ne ressens plus rien.
Maintenant, nous ne sommes plus rien.
Je mets donc fin,
À l’illusion de combler ma faim
D’amour, car ce n’était rien
Qu’une amitié sans lendemain. 

Texte n°17 – Poussière 

Autour de toi, pleurs et cris et explosions
Troublent mon silence à travers une faible connexion
Séparées par la mer et tout un monde aphone
Liées par le hasard et deux vieux téléphones
Dans le calme plat de mon village en paix
Je reçois les nouvelles de ta ville assiégée
“Il y avait des gens, et des chats et des chiens
Ils ne sont plus que poussière, mon Dieu, il n’en reste plus rien !
Serai-je la prochaine, mon âme, ma soeur,
Retrouvera-t-on mon corps et retrouvera-t-on mon coeur ?”
Et face à l’horreur, qu’ai-je de plus à t’offrir
Que des mots sans saveur qui ne sauraient suffir ?
Si au moins je pouvais de mes bras t’enlacer
Faible réconfort sous le ciel enflammé
Protéger ta famille et tes rêves de mon corps
Restaurer ton avenir figé en plein essor
En bas de ton immeuble tombe bombe après bombe
Et les chars féroces dans ta rue entrent en trombe
“J’entends leurs chaînes sur la route”, tu me dis
Plus rien ne laisse la place au doute, je blêmis
Je le sais et tu le sais
Mais l’une comme l’autre, on le tait
Bientôt, je ne recevrai plus de notification
Mes messages sans réponse, accablés de questions
Le saurai-je seulement, quand ta fin viendra ?
Qui saura m’appeler, qui me le dira ?
Personne autour de moi ne verra ton absence
Personne n’entendra le changement de silence
Nous deviendrons, du jour au lendemain
Amie poussière, amie de rien 

Texte n°18 – Ma dulcinée 

Cette amitié que tous auraient souhaité avoir,
Enfin, du moins les souvenirs qu’il en reste dans ma mémoire.
Celle avec qui les barrières de la distance ne changent rien à cette connexion, cette fusion.
Enfin, jusqu’à ce que tes sentiments et tes pensées en décident autrement.
Nos âmes mises à nu, reflétant tes blessures cachées ;
En qui dois-je désormais me confier ?
En vaut-il la peine de réessayer quand nous savons toutes les deux
Que recoller les morceaux implique le renouveau,
Mais que ce tourment dans ta tête, traduit par ton silence, n’a rien de nouveau,
Exposant ainsi les cicatrices de cette cassure de nos deux âmes liées.
J’ai touché le fond, je décide donc de me fondre dans le lointain.
Qui aurait cru que tes derniers mots seraient si crus,
Laissant une fissure dans les murs de ma personnalité ?
Un lien transformé en rien, par les reproches que tu ne sus exprimer autrefois,
Mais si sincères qu’ils étaient, il était nécessaire pour moi de m’en aller
Car je ne peux me pardonner à ta place.
Dans le lointain je t’aimerai. 

Texte n°19 – Un acarien 

J’aurais aimé être ton bon ami
Et me voilà seulement bon à rien
Mais pas, heureusement, un bon aryen
Pas plus que je ne suis un Bel Ami
Et s’il m’arrive de me fourvoyer
D’être bien malhabile à flamboyer
Pour te plaire, toi qu’à l’infini j’aime
Toi dont le regard a l’éclat des gemmes
Face auquel je me sens tel un chameau
Qui prend son élan pour passer le chas,
Comme un élan qui se prend pour le shah,
Me voilà, pire bête de ce zoo
Qui ne vaux guère mieux qu’un acarien
Ni veau, ni guêpe, mieux : un moins-que-rien
Que ta vénusté laisse bouche bée
Alors je déraisonne, je m’affole
Je m’égare, je pique, je m’envole
Et au rêve d’être ton sigisbée
Tu réponds : « Stoppe ton tralala je
N’ai en rien besoin d’un ami volage ». 

Texte n°20 – Rien, et pourtant 

Tu n’avais rien — ni drapeau, ni flamme,

Juste un souffle discret, l’écho d’une âme,

L’odeur de l’ombre, un murmure effacé,

Un vide chargé de ce qu’on n’osait nommer.



Tu es entré·e comme un soupir de brume,

Sans bruit, sans lumière, sans costume.

Et moi, cœur battant, nu dans l’oubli,

J’ai vu ton « rien » — j’y ai bâti ma vie.



Rien. Mais rien comme un cri qui s’efface,

Comme un nom perdu dans le vent qui passe.

Rien, comme un feu dissimulé sous la neige,

Comme un serment brûlé aux lèvres d’un piège.



Tu as donné sans prendre, pris sans voler,

Un amour retourné, un ciel étoilé.

On t’a dit·e floue, banale, brisée,

Mais dans tes ruines, j’ai vu l’éternité.



Ami·e de rien — mais rien, c’est l’abîme,

C’est l’écho des âmes, la mémoire des cimes.

C’est tout ce qu’on tait, l’élan des accords,

C’est toi, c’est moi — c’est le monde plus fort. 

Texte n°21 – Âmes soeurs toxiques 

A l’aube de mes quarante-quatre printemps,
Mon amitié pour toi est remise en question.
Ensemble nous fîmes pour toutes deux des bastions,
Sans savoir qu’un jour tu deviendrais le néant.

Sœurs de cœur, flammes jumelles, nos cœurs en émoi,
Orientaient nos destins , nos volontés, nos choix.
Éternellement, tu serais là, disais-tu.
Une seule rencontre a suffit pour nous séparer.
Racine du mal, pour toi porte de salut
Sortilège pour moi, cette poudre qui te monte au nez.

Tant de fois, j’ai tenté de te venir en aide,
Oui, me répondais-tu sans un mot en penser.
Xxl devinrent les doses que tu t’infligeais.
Invariablement vers ta chute tu t’enfonças.
Que faire devant celle qui te rendit laide?
Une ennemie onirique qui t’a fourvoyé ?
Entre espérance et désespoir je naviguais,
Sans issue, sans amie, ton âme s’envola. 

Texte n°22 – Amis de bien 

Amis de bien,
Amis
De rien.

Amis, j’ai ri !
Puis amis partis…
Donc amis, j’ai fui.
Mais amie, je suis
Amis : je suis.
Amis, je vis.

Amis, parfois
Le manque de vous
Contracte mon cœur.
Et l’interroge.

De nous, que reste-t-il ?
De notre vécu commun ?
De tout ce temps passé
Ensemble ?

Rien.

Au fond, rien ?
Au fond, non.
Au fond, je sais.
Au fond, il reste
Des rires
Des ires.
Des souhaits et des envies.
D’autres amis, bien des joies
De la volonté, et une meilleure connaissance de moi.
De vous.
De ces êtres qui peuplent ma vie
Qui apparaisse, qui parfois reste,
Qui, parfois, non.

De nous, j’ai tant appris.
M’ouvrir, pleurer.
Pardonner. Comprendre.
Que l’amour seul ne suffit pas,
Et combien il est indispensable pourtant.

Que l’on peut se voir quitter
Même quand l’amour est toujours là.
Que parfois, cela revient à se choisir
Que de laisser partir un être cher.

Et puisque je me suis,
Et puisque vous vous êtes
Choisi
Le temps passé ensemble prend donc tout son sens.

Car. Qu’y a-t-il de plus précieux
Que ces liens qui nous apprennent à nous aimer ?
Qui nous apprennent à dire au revoir, même.
Lorsque c’est pour mieux s’honorer soi ?
À dire adieu à ceux que l’on aime
Avec remords, mais sans regret réels ?

Amis, au revoir.
Amis, de rien.
De rien pour tout le bien que j’ai pu vous faire voir
Car vous m’en avez fait voir tout autant. 

Texte n°23 – Amour rayonnant 

À l’aube des jours oubliés,
Émergeant du cœur même de l’immensité,
L’indescriptible ballet des deux astres régent ornés,
Danse lascive, hélas, qui n’est partagée,
Rendant risible chacun des pas de ces derniers.

Triste tableau de deux cœurs ne pouvant même s’effleurer,
L’un voué au noir, l’autre pour briller,
Briller au plus haut que ne saurait l’immaculé,
Tel un phare chassant l’ombre de l’obscurité,
Attirant à lui chacun des astres égarés.

Nous récompensant à chaque valse achevée,
D’une splendide merveille qu’on ne put imaginer,
L’enivrant voile de sa tendre et douce bien-aimée,
Ultime rempart de son éminence exacerbée.
Il est le roi, nul ne saurait lui résister,
À l’instar de sa reine qui portera sa marque pour l’éternité,
Rendant quelconque amour, un souvenir presque oublié.

Il se languira d’elle jusqu’à ce qu’il ne puisse plus se contrôler,
Elle s’opposera à lui jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus nous faire rêver.
Dernier glas d’une partition bâclée,
Hommage de deux astres qui ne peuvent se séparer,
Ce n’est pas de l’amour, rien ne peut le qualifier,
C’est ce que nous, nous appellerions une amitié. 

Texte n°24 – Le fil s’est tu 

Tu étais ma rue ouverte
Mon mot sans filtre
Le signal bleu de mes jours muets
Un café tiède oublié sur le bord du monde

On s’est parlé comme on scrolle
Avec l’illusion d’appartenir
À la même image
À la même vitesse
Mais ton cœur n’a plus vibré à mes messages
Fantômes

Tu as changé de fil,
J’ai changé de peau
Rien de tragique, rien d’écrit
Juste un silence mis à jour

Je t’ai cherché dans mes playlists
Dans les stories d’avant minuit
Dans les sourires en mode avion

On s’est pas dit adieu
On a juste laissé la conversation en veille
Comme un onglet de trop
Qu’on n’ose ni rouvrir ni fermer

Et pourtant
Je garde ta trace
Non pas dans le cœur
Mais dans la mémoire cache
Là où s’accumulent
Les liens cassés
Et les preuves
Qu’on a cru, un jour,
Être indispensables. 

Texte n°25 – Am·e de rien 

épaule enneigée
je l’ai chassé l’ami sûr
venu s’enquérir 

Texte n°26 – Nouvelle page 

Une page se tourne
et maintenant j’avance
il est temps
de suivre une nouvelle cadence

Sûrement, je ne pourrais
avec moi, t’emmener
je dois renoncer
et, à ta vie, te laisser vaquer

Je suis heureuse pour toi
je dois juste faire le deuil
de ce que tu représentais pour moi

Aujourd’hui,
je ne te vois pas,
tu n’es plus là

Malgré tout,
je te remercie
pour ce que tu as apporté à ma vie
même si notre relation s’est finie
depuis qu’elle est entrée dans ta vie 

Texte n°27 – Ami de rien, wallou, nada 

J’ai claqué les portes, j’ai dit basta,
Le cœur usé, j’fais plus de bla-bla.
L’amitié ? Wallah, trop de chira,
Des sourires en face, et des couteaux dans le dos, khoya.

J’suis pas méchante, juste fatiguée,
Mieux vaut la solitude que les faux liés.
Sous mon haïk, j’cache des silences anciens,
Je suis moi…
Ami de rien. 

Texte n°28 – Rebellion amicale 

Avec toi les paroles s’effacent
Avec toi un regard suffit
Avec toi tes actes m’enlacent
Avec toi l’amour sculpte une vie

Sans toi les retours manquent de vie
Sans toi les jours sont prisonniers de l’ennui
Sans toi n’existe pas
Sans toi c’est vivre la fin d’une supernova

Nous deux on s’est choisis
Nous deux n’a pour limite que l’immatériel
Nous deux on s’est comprises
Nous deux n’a pour limite que le ciel

Tu m’apprends à vivre l’instant présent
Tu me donnes tout, avec brutalité
Tu me fais rire même les jours sans
Tu me guides au travers du vent

Ma vie est éblouie de ta présence
Je redoute d’être aveuglée par ton absence
Notre vie est suspendu à la tienne
Je suis marquée par ta patte magicienne
Ma vie suit le trajet de la tempête
Je suis cette tempête, ce désordre de ta fête
Car tu es une tempête au coeur d’un épisode de ma vie
Une étoile filante au coeur de la nuit
Une vague de chaos et de calme au coeur de mon tumulte
Un vent doux qui caresse et fort qui catapulte

Un merci qui s’efface…
Mais qui résonne dans ce fragment d’éternité
Un lien, un tout inexpliqué aussi improbable qu’une paire d’as
Mais ce qui résonne,
C’est l’invisible qui s’ancrache,
Le silence qui nous parle,
L’évidence sans raison,
L’amour sans condition.

Ma rebelle, mon amie de rien, mon amour de chien 

Texte n°29 – Amies ? 

Je ne te connais pas, pourtant

Toi aussi, tu as dis-sept ans

Tu ne me connais pas, pourtant

Tu contes ta vie en riant

Et moi j’y plonge

Sans que j’y songe

Happée par tes grands sentiments

Par les tournants de tes tourments



J’ai l’impression de te connaître

Comme une amie, de tout mon être

Tu te livres, je te lis et me lie

Pensant plus à toi qu’à ma propre vie

Et, un jour, ça y est, j’ose, je t’écris

Et je stresse, je panique, j’attends

Mes mots te parlent, tu demandes : qui ?

Qui je suis, pourquoi ce texte en suspend ?



J’hésite entre continuer à t’écrire

Quitte à te faire fuir, quitte à tout détruire

Où laisser cet échange en interlude

Pour la beauté de cette incertitude



Nous ne sommes pas amies, pas encore

Mais tout est possible, tu es d’accord ?

Amies ? L’avenir nous le dira

De rien, j’ai tant aimé vivre ça

Et maintenant, l’histoire dit quoi ?

La suite, je ne la connais pas. 

Texte n°30 – Elles toutes 

On avait tendu les câbles tout autour de la cour, culotté les amphores. Filaments de verre rouge, filaments jaune, verts, bleus, deux cent vingt quatre ampoules se tenaient en farandole, liées par la promesse du petit doigt.

On avait monté les projos sur le bûcher à l’étage de la grange. La treille qui courait ses vieilles pierres acheminait l’électricité depuis le transfo surquel elle avait fait ses racines, peu après son installation.

Lorsque chiens et loups glanèrent la vallée de ses rayons dorés, on perça le fut. Les avant-soir avaient ce goût volage de l’éternité qu’elles ne manquaient jamais. La montagne gagna la ripaille de sa longue brise. Loin que les chandails ne suffisent, c’est autour du feu qu’iels finirent de rire – le génépi et l’eau de vie, aussi.

Au matin la cueillette, déambulation à pleine brouette. Herbes charnues, clochettes sensibles, cœurs buissonnants aux calices drus, l’arche qui allait recueillir leurs vœux se vêtissait à leur image. Il ne restait plus qu’à délayer les heures chaudes dans les plis de la rivière : tout était prêt.

Au village courait une question : des dix, de qui était-ce l’union ?

Elles toutes.

Tour à tour sœurs, guides, boussoles, chaperonnes, elles s’aimaient depuis quinze ans et voulaient faire comme tout le monde : le dire.

Elles avaient laissé de côté tout le carcan nucléaire dont elles n’avaient que faire : l’alliance sous contrat, la main cédée, le doigt scellé. Leurs liens était un lieu ouvert, aux jardins pluriels et aux espaces personnels. Leur liberté ne demandait rien, si ce n’était de rester telle.

Et sous l’arche
à la tombée du jour
on entendit l’amitié
déclamer l’amour

Et sous l’arche
au chant des discours
exaltait la céleste
indomptable reine
sororité 

Texte n°31 – Dette d’honneur 

Je ne connaitrais jamais

l’horreur

les sanglots

le chagrin

de sentir sur mes genoux

entre mes mains

la tête coupée

de mon ami mort

de mon tendre ami mort

tué de mes mains

pour m’avoir déçu

pour n’avoir su

répondre à mes espoirs. 

Texte n°32 – Amie de rien 

Amie de rien,
De rien du tout,
Rien ne nous liait,
Et pourtant nous :

Étions ensemble,
Étions heureux,
Étions sans rien,
Mais avions tout.

Et nos miroirs
Et nos photos
Laissaient à voir
Nos rires fous.

C’ est peut être là,
Que j’ ai compris,
Que nos visages
Formaient un nous. 

Texte n°33 – Lumière chaire 

Aux creux des cieux,
Un bouleversement silencieux.
Barrières pourtant bien réelles.

Un morceau de réalité exposé,
Contre une amitié inachevée.
Désormais, enfermées en elle.

Par un écoulement progressif,
D’un ton rouge vif.
Tes maux glissent sur ma peau.

Tendresse froide, qui déçoit.
Comme une caresse du bout des doigts.
Je pense à toi, quand tout me semble faux. 

Texte n°34 – Amie de rien 

Ma chère amie,



Avec toi, mes journées sont illuminées de tout petits riens.

Jour et nuit, à la clameur de mon cœur, tes mots font du bien.

Comparé à toi, je ne suis rien.

J’ai beau essayer, t’imiter est vain.

Je ne cesse de rester un moins que rien.

Sans un bruit, ma vie dans l’ombre n’est plus clarté.

Mon nom en affront, dignité entachée

D’une identité bafouée.

Ma lâcheté ne peut racheter mes méfaits.

Ma paresse me contraint à t’abandonner.

Ô combien, j’aimerais rester, pour toujours, à tes côtés.

Émerveillé de tes qualités, je t’aimais comme tu es.

Je t’en prie, ne change jamais !

Face à la mer argentée que tu étais,

Je n’étais que ce sable fin balloté.

Tu étais mon tout, je n’étais rien.

Le tout figé, au vent le rien s’en est allé…



Adieu mon précieux tout.



Le rien 

Texte n°35 – Les mots à mon amie ont mis nos âmes à nue 

Parce que le temps défile sous mes yeux
Humides comme un jour pluvieux.
Parce que mon cœur devenait bien trop lourd
Il ne supportait pas que je fasse le sourd
Parce qu’ une urgence envahissait tout mon corps
Mes pieds, ma tête et mon torse
Parce que j’ai trouvé les mots pour te dire
À quel point j’avais besoin de partir.

Parce que l’amitié est une forme d’amour
Même entre un homme et une femme
Parce que j’ai voulu qu’à la fin du parcours
Il nous reste une petite flamme.
Parce que j’ai eu peur de redécouvrir
La souffrance incarner ton regard
Parce que je t’ai obligé à ouvrir
Une porte de sortie d’histoire
Parce que c’est une vraie épreuve de plus
Après toutes ces tempêtes infernales
Parce que ma patience sous l’arrêt de bus
N’ attendais rien qu’ un vaisseau spatial.
Parce que je vais où se trouve mon mieux
Pour toujours pouvoir faire le bien
Parce que ce n’est pas du tout un adieu
C’est juste que je te lâche la main.

Alors,
Est ce que c’est pour ça que tout à l’heure
J’étais heureux de discuter avec toi ?
J’ai pris du plaisir à goûter la saveur
De notre amitié, en te prenant dans mes bras. 


Texte de calibrage par La Rathure – Rame

Dentifrice sur cravate,
Café froid bu à la hâte,
Avalé avec trois dattes,
Agenda cuir écarlate,

Rouge à lèvre dans l’ascenseur,
Quelques miettes sur le tailleur,
Ses lunettes regardent ailleurs,
Porte-clé singe rieur,

Porte cochère délicate,
Quelques pièces au monnayeur,
Lèche-vitrine d’un numismate,
Gobelet siglé torréfacteur

Montre au poignet, pile à l’heure,
Pas pressé sur l’asphalte,
S’engouffre l’air rieur,
Dans la station, métro quatre,

Coup d’épaule dans la porte,
Coup de main pour la retenir,
Coude à coude dans la cohorte,
Coups d’oeil sur le train à venir,

Iels s’asseoient face à face,
En fait comme tous les matins,
Même métro, même place,
Même tête, même strapontin,

Iels s’ignorent en connaissance,
Se cherchent sans se regarder,
S’inquiètent d’une absence,
Se rassurent sans en parler,

Et même sans se croiser,
Echange de regards complices,
Dans le lointain, noyé
Des reflets du métro Saint Sulpice

Sous les yeux du lapin,
Qui s’est encore coincé les doigts,
Ami·es, à presque rien,
D’un quotidien, d’une prochaine fois


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Merci à BB2, Idéesdodues, Nicole, Thomas Deseur et un anonyme de m’y soutenir !

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